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Une analyse proposée par les Grignoux
et consacrée au film
Le Fils de l'autre
de Lorraine Lévy
France, 2012, 1h45


L'analyse proposée ici s'adresse à tous les spectateurs qui verront le film Le Fils de l'autre et qui souhaitent approfondir leur réflexion sur son thème principal. Elle retiendra également l'attention des animateurs en éducation permanente qui souhaiteraient débattre de ce film avec un large public.

Le film

Image du filmEn Israël, le jeune Joseph s'apprête à faire son service militaire, mais une prise de sang révèle bientôt qu'il n'est pas le fils biologique de ses parents. Une rapide enquête montre alors qu'il a été échangé à la naissance avec Yacine, enfant d'une famille palestinienne de Cisjordanie. Ce quiproquo, loin de tout esprit de comédie, sera l'occasion pour tous, parents et enfants, Israéliens et Palestiniens, d'une remise en cause de leurs certitudes les plus intimes.

Le Fils de l'Autre aborde à travers une situation exceptionnelle le conflit israélo-palestinien en évitant aussi bien la caricature que les bons sentiments. Il montre en particulier la profondeur des haines et des ressentiments malgré une pacification apparente. Et bien entendu, il ne prétend pas résoudre de façon individuelle un conflit qui perdure depuis plus d'un demi-siècle.

Destination

Ce film profondément humaniste .

Histoire

Tous les spectateurs qui verront le Fils de l'Autre ont entendu parler du conflit israélo-palestinien, mais la connaissance que chacun d'entre nous en est certainement très variable. Bien entendu, l'on peut facilement mener une recherche, que ce soit sur Internet ou dans des ouvrages spécialisés, où l'on trouvera un grand nombre d'informations. Mais la quantité d'informations risque d'ailleurs de nuire à la compréhension, surtout pour les personnes qui sont peu au fait de ces événements. En outre, — et ce point est sans doute beaucoup pus sensible —, l'importance et le sens des événements varient grandement en fonction du point de vue envisagé.

L'on propose donc de partir d'une représentation schématique de l'histoire israélo-palestinienne en ne retenant d'abord qu'un minimum d'événements et en distinguant nettement le point de vue israélien et le point de vue palestinien (qu'on représentera ci dans deux colonnes opposées): on essaiera ainsi de déterminer pour les uns et les autres cinq événements-clés qu'on pourra considérer comme autant de têtes de chapitre à compléter ensuite avec les autres informations historiques dont le lecteur dispose déjà où qu'il pourra recueillir ultérieurement. Cette manière de faire, sans aucun doute simplificatrice, permettra cependant à chacun d'avoir une vue synthétique de cette histoire complexe, tout en percevant facilement les différences de points de vue.

Le choix des moments-clés peut être discuté, mais il ne s'agit que d'un cadre qui doit être ensuite complété. Il faut cependant d'abord bien comprendre les dix événements retenus (5 du point de vue israélien, 5 du point de vue palestinien) en recherchant éventuellement des informations complémentaires à leur propos.

Ainsi, la tenue du premier Congrès Sioniste mondial en 1897 permet de dater le début de l'immigration juive d'origine européenne en Palestine (même si la première colonie agricole sioniste date de 1878). La grande Révolte arabe en Palestine de 1936 est en revanche le point culminant de la résistance des Arabes de Palestine au mandat des Britanniques (considérés comme une puissance occupante) mais est également dirigée contre l'immigration juive de plus en plus importante[1] dans la région: l'écrasement de cette révolte est pour les Palestiniens une première défaite face à un mouvement sioniste de plus en plus conquérant jusqu'à la première Intifada.

Image du film

Des moments-clés…

pour Israël
 
pour la Palestine
  du XVIe siècle…  
1896: publication de L'État juif (Der Judenstaat) par Theodor Herzl, Juif austro-hongrois; l'année suivante, convocation du premier Congrès sioniste mondial en Suisse du XVIe siècle période ottomane  
  … à 1918  
  de 1921… 1936-1939: la grande Révolte arabe en Palestine mandataire
1939-1945: la destruction des Juifs d'Europe par les nazis mandat britannique
  …au 14 mai 1948 Novembre 1947 - fin 1949: la Nakba, c'est-à-dire le départ et l'expulsion de plus de 700000 Arabes de Palestine hors de ce qui deviendra l'État d'Israël
14 mai 1948: proclamation de l'État d'Israël et première guerre israélo-arabe  
Juin 1967: la guerre des Six Jours    
    1969: Yasser Arafat devient le leader de l'OLP (Organisation de Libération de la Palestine) qui mène une lutte militaire contre Israël (à partir du Liban notamment)
    Décembre 1987 - septembre 1993: première Intifada
Septembre 1993: accords d'Oslo entre Israël et l'OLP, qui prévoient qu'une autorité palestinienne s'exercera de façon limitée sur la Cisjordanie et la bande de Gaza    
    Septembre 2000-2005: seconde Intifada

Image du film

10 dates

1896: publication de L'État juif (Der Judenstaat) par Theodor Herzl, Juif austro-hongrois; l'année suivante, convocation du premier Congrès sioniste mondial en Suisse

Face à l'antisémitisme européen, Theodor Herzl fonde le mouvement sioniste avec comme but l'émigration des Juifs européens vers la Palestine qu'il pense peu peuplée (et qui correspond aux territoires actuels d'Israël, de la Cisjordanie et de la bande de Gaza réunis). Au départ, beaucoup de Juifs préfèrent cependant émigrer vers l'Amérique et seule une minorité d'entre eux s'installent sur ce qu'ils estiment être la terre d'Israël. Après la Première Guerre mondiale, alors que la région est passée sous domination britannique, l'immigration juive va augmenter et concerner des dizaines de milliers de personnes par an, ce qui va entraîner des heurts avec les populations arabes locales.

1936-1939: la grande Révolte arabe en Palestine mandataire

Le sionisme se présente d'abord comme un mouvement d'immigration, les Juifs achetant des terres aux grands propriétaires de la région. Mais ces terres étaient souvent cultivées par des paysans pauvres ou des ouvriers agricoles bientôt privés de leurs moyens de subsistance. En outre, les Juifs immigrés, qui passent de 84000 personnes en 1922 à 386000 en 1937, forment leurs propres communautés, parlent leur propre langue (l'hébreu) et n'ont que peu de contacts avec la société arabe environnante. Des heurts éclatent d'abord localement, puis ils prennent la dimension d'une révolte générale en 1936 quand les Arabes comprennent que le mouvement sioniste vise à terme à la création d'un État propre sur le territoire de la Palestine. La Grande-Bretagne, qui a mandat d'administrer la région réprimera militairement cette révolte mais mettra également temporairement fin à l'immigration juive.

1939-1945: la destruction des Juifs d'Europe par les nazis

L'antisémitisme européen va prendre sa forme la plus terrible avec l'arrivée des nazis au pouvoir en Allemagne, qui conduira à l'extermination d'environ six millions de Juifs. Beaucoup de survivants seront tentés à la fin de la Seconde Guerre mondiale par l'émigration vers l'Amérique mais aussi vers la Palestine.

Novembre 1947 - fin 1949: la Nakba, c'est-à-dire le départ et l'expulsion de plus de 700000 Arabes de Palestine hors de ce qui deviendra l'État d'Israël

À la fin de la guerre, la Grande-Bretagne est prête à abandonner son mandat sur la région (mandat qu'elle va remettre à l'ONU), tout en étant confrontée aux revendications nationalistes des Juifs comme des Palestiniens. Les heurts se multiplient en effet entre les deux communautés qui se sont armées (souvent de longue date) et débouchent finalement sur une véritable guerre. Une partie des Palestiniens vont quitter (dans leur esprit, temporairement) la région pour échapper aux violences, mais d'autres vont être expulsés de façon brutale. De nombreux villages palestiniens seront ainsi vidés de leurs populations par les forces armées juives puis dynamités pour empêcher tout retour.

14 mai 1948: proclamation de l'État d'Israël et première guerre israélo-arabe

Alors que l'ONU a proposé la création de deux États en Palestine (plan qui est rejeté par les Arabes qui s'estiment majoritaires), les leaders du mouvement sioniste proclament la naissance de l'État d'Israël. Cela provoque une première guerre avec les pays arabes voisins, dont le tout nouvel État d'Israël sort vainqueur, mais ses frontières sont nettement agrandies par rapport au plan de l'ONU, qui prévoyait 55% du territoire pour les Juifs. Le territoire israélien occupe désormais la plus grande partie (78%) de la Palestine historique (voir les cartes à la page suivante).

Juin 1967: la guerre des Six Jours

En 1967, Israël lance une attaque préventive contre les pays arabes voisins — Syrie, Jordanie et Égypte — qu'il juge hostiles et menaçants. En quelques jours, les armées israéliennes conquièrent un vaste territoire (le plateau du Golan syrien, la Cisjordanie et le désert du Sinaï égyptien). Israël apparaît alors comme la plus grande puissance militaire de la région. Deux nouveaux territoires peuplés d'Arabes palestiniens, — la bande de Gaza et la Cisjordanie — sont alors occupés par Israël.

1969: Yasser Arafat devient le leader de l'OLP (Organisation de Libération de la Palestine) qui mène une lutte militaire contre Israël (à partir du Liban notamment)

Les Palestiniens expulsés en 1947 et pour d'autres en 1967 se retrouvent en grand nombre dans des camps de réfugiés dans les pays arabes voisins d'Israël. Suite à la défaite des armées arabes, un certain nombre de Palestiniens mettent sur pied des mouvements de libération dont les objectifs sont politiques mais qui recourent à la lutte armée, en Israël mais aussi dans d'autres pays frappés par des actions de type terroriste. Divisés en multiples factions, ces mouvements seront progressivement dominés par l'OLP de Yasser Arafat, qui obtiendra progressivement une reconnaissance internationale.

Décembre 1987 - septembre 1993: première Intifada

La lutte armée des factions palestiniennes à partir des pays arabes voisins d'Israël se révèle un échec face à la puissance militaire de l'État hébreu. Les Palestiniens des territoires occupés (Cisjordanie et bande de Gaza) vont alors se révolter dans un grand mouvement de désobéissance civile par des manifestations répétées et un harcèlement continu des forces israéliennes notamment avec des jets de pierre et des barricades rapidement dressées. Cette révolte, qui fit plus de 1500 morts du côté palestinien et 160 du côté israélien, allait obliger l'État hébreu à prendre en considération le refus palestinien de l'occupation et à entamer (sous l'égide américaine) des négociations avec l'OLP.

Septembre 1993: accords d'Oslo entre Israël et l'OLP, qui prévoient qu'une autorité palestinienne s'exercera de façon limitée sur la Cisjordanie et la bande de Gaza

Après des années de lutte armée, l'OLP et Israël parviennent à un accord qui prévoit la mise en place d'une Autorité palestinienne sur les territoires de Cisjordanie et de Gaza.

Septembre 2000-2005: seconde Intifada

Face aux faibles avancées des négociations entre Israël et l'Autorité palestinienne (dont les pouvoirs sont réduits), la population palestinienne (notamment les plus jeunes) se révolte à nouveau, mais cette fois de façon beaucoup plus violente. La seconde Intifada se caractérisera notamment par des attentats suicides commis par des Palestiniens sur le territoire israélien, des affrontements armés, des violences entre les différentes factions palestiniennes, et une répression militaire israélienne. Par ailleurs, Israël érigera une barrière de sécurité tout au long de sa frontière avec des empiétements sur les territoires palestiniens pour empêcher les heurts et les violences entre les communautés. Même s'il n'y a pas de date de fin de la seconde Intifada (qui, pour certains, est toujours en cours), l'intensité et la violence de la révolte diminuent fortement à partir de 2005.

1. Ci-dessous l'évolution de la population de Palestine sous mandat britannique

année Palestiniens
(musulmans et chrétiens)
Juifs
1922 668 000 84 000
1931 858 000 175 000
1937 997 000 386 000
1947 1 305 000 650 000

3 cartes pour mieux comprendre

Palestine sous mandat britannique

Entre 1920 et 1947, la Palestine est placée avec la Jordanie (appelée alors Transjordanie) sous mandat britannique, mais, suite à des émeutes arabes en avril 1920 puis au printemps 1921, les autorités britanniques restreignent l'immigration juive au seul territoire à l'ouest du Jourdain (et l'interdisent de fait en Jordanie). À partir de ce moment, on entend par Palestine, le territoire sous mandat britannique à l'ouest du Jourdain, et par Transjordanie (future Jordanie) le reste du territoire sous mandat britannique à l'est du Jourdain.

En 1947, l'ONU à peine constituée au sortir de la Seconde Guerre mondiale propose un plan de partage de la Palestine en deux États, l'un arabe, l'autre juif. Ce plan sera rejeté par les pays arabes et par les leaders palestiniens qui l'estiment déséquilibré et qui préfèrent la formation d'un seul État où ils seraient majoritaires. Ce plan ne sera jamais appliqué.

Plan de partage de l'ONU
L'État d'Israël

Après la guerre israélo-arabe de 1948, l'État hébreu conquiert la plus grande partie de la Palestine mandataire; la bande de Gaza revient cependant à l'Égypte, et la Cisjordanie à la Jordanie.

En 1967, suite à la guerre des Six-Jours, ces deux territoires (avec d'autres comme le désert du Sinaï égyptien et le plateau du Golan syrien) seront également occupés par Israël. (La Jordanie renoncera à sa souveraineté sur la Cisjordanie en 1988, comme l'avait fait l'Égypte par rapport à la bande de Gaza en 1978.)

Suite aux accords d'Oslo de 1994, une Autorité palestinienne limitée s'exerce sur la Cisjordanie et la bande de Gaza.

Bien que couramment employé, le terme de Cisjordanie ne correspond pas au sentiment d'appartenance nationale des Arabes de la région qui se considèrent comme Palestiniens (et non comme des «Cisjordaniens»). Les Israéliens préfèrent quant à eux utiliser l'appellation biblique de Judée-Samarie.


1. d'après http://www.mideastweb.org/palpop.htm (Réseau du Moyen-Orient) et http://ifpo.revues.org/502 (Institut français du Proche-Orient).

Un dossier pédagogique complémentaire à l'analyse proposée ici est présenté à la page suivante.
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