Alethea Arnaquq-Baril est une jeune réalisatrice inuite de la région arctique du Canada. Après une dizaine d’années d’études aux États-Unis, elle décide de se connecter à ses traditions
Alethea Arnaquq-Baril se sent envahie d’un vide. Après douze ans de formation à l’étranger, elle ressent l’impression d’être déconnectée des savoirs qu’elle aurait dû acquérir en tant que femme Inuit. Elle ne se sent pas accomplie, elle ne sait pas coudre des vêtements traditionnels ni chasser le phoque. Et elle n’est pas tatouée. Alethea décide alors de partir pour un grand voyage avec son amie de longue date, et activiste, Aaju Peter, à la rencontre des communautés inuites. Afin de comprendre leur passé, elles parlent avec les anciens et anciennes et apprennent l’histoire d’une forme d’art populaire féminin. Elles vont notamment découvrir à quel point leurs traditions ont été étouffées, voire interdites, pour progressivement disparaître de la culture inuite.
Aux XVIIe et XIXe siècles, les missionnaires chrétiens européens arrivent en effet dans la région et commencent leur approche prosélyte : avec le révérend Edmon Peck, un missionnaire radical, apparaît la transmission de l’écriture syllabique, des pensionnats pour enfants inuits sont créés au sein desquels leur mode de vie est grandement critiqué. Tout cela annonçant les prémices d’une culture qui va bientôt être piétinée.
Avec Tunniit, on découvre une quête à la fois personnelle – recherche d’émancipation –, et politique – se réapproprier ses traditions et dénoncer les conséquences coloniales sur les communautés inuites – que ces deux femmes vont accomplir pour nous offrir un documentaire hors du commun, une trace historique.
LUDIVINE FANIEL, LES GRIGNOUX