L’histoire d’amour contrariée de deux jeunes en fuite, en plein été. Monika rompt avec les conventions du cinéma classique et de la morale. L’un des films fondateurs du cinéma moderne et précurseurs de la Nouvelle Vague française
Livreur de boutique vivant seul avec un père veuf, Harry (Lars Ekborg) rencontre Monika (Harriet Andersson), adolescente de deux ans sa cadette. Elle abandonne sa famille nombreuse, lui son poste de sous-fifre. Ils naviguent vers l’archipel de Stockholm pour un été d’aventure et pour concrétiser leur rêve d’une vie meilleure, insouciante et idyllique.
Monika, c’est la légèreté, l’invention, l’éloge de la révolte, la bienveillance à l’égard d’une jeunesse écrasée par une génération installée, un regard admiratif, bienveillant et lucide sur un couple en cavale. L’histoire, pourtant, est la plus vieille qui soit : lui, dix-neuf ans, gauche et enthousiaste, elle, dix-sept, rouée, trop belle pour lui. Ils sont jeunes, ils sont amoureux, ils s’enfuient. Très vite, le dénuement leur pèse. Les exigences érotiques de la jeune fille ne sont probablement pas satisfaites par le jeune homme inexpérimenté...
Bergman crée dans un geste instinctif le canevas formel de la modernité (une instantanéité du cinéma, l’importance des affects) et impactera, au passage, les jeunes réalisateurs français : c’est l’affiche de Monika que le personnage d’Antoine Doinel volera dans Les 400 coups (ce qui ne manque pas de piquant quand on sait que Truffaut targuait le film de Bergman de faux érotisme), tandis que Godard en fera l’éloge dans les Cahiers du cinéma. Enfin, Monika reprend les éléments du naturalisme (misère quotidienne, banalité du malheur, chape sociale inévitable) pour les tirer vers un ailleurs de la création : expressivité des paysages (le départ rayonnant sur les eaux de Stockholm, le retour grisâtre sous un ciel de plomb) et affirmation d’un désir, gauche et maladroite de la part du comédien, racée, gracieuse et entière de la part du metteur en scène qui filme amoureusement une muse clandestine.