Oubliez le titre débile et tentez cette comédie politico-romantique qui marie allègrement la satire politique au potache et le romantisme au vulgaire. Le réalisateur Jonathan Levine offre à Charlize Theron et Seth Rogen deux rôles pimentés, hilarants, et parfois tendres
Le film nous le permet, nous n’en parlerons donc pas avec le dos de la cuillère. Séduis-moi si tu peux !, c’est un peu un Vice en plus potache mais aussi en plus féministe, mâtiné d’un côté Coup de foudre à Notting Hill assumé. Hautement improbable donc, mais carrément jubilatoire.
Dans ce scénario, le président des États-Unis, Chambers, est une ancienne star du petit écran, qui n’aime rien tant que de se regarder à la télé dans son rôle de… président !
Charlotte Field (Charlize Theron), quant à elle, est secrétaire d’État et jongle avec un agenda tellement chargé qu’elle est capable de faire des micros-siestes debout. C’est une femme brillante, portée par des idéaux environnementaux, qui doit pourtant sans cesse composer avec le sexisme ambiant qui la renvoie à son statut de belle femme, tout comme avec une culture du compromis qui la fatigue. Malgré tout, elle compte bien se présenter aux élections présidentielles de 2024, avec la bénédiction de son benêt de président qui, de toute manière, a décidé de ne pas se représenter et vise maintenant une autre carrière : devenir star de cinéma (une scène d’anthologie !). Une transition risquée, puisqu’avant lui seul Woody Harrelson et George Clooney sont parvenus à passer du petit au grand écran avec brio, mais c’est un challenge qui le stimule. Il est donc prêt à soutenir sa fidèle secrétaire d’État pour qu’elle se présente dès 2020, c’est-à-dire demain.
Pendant ce temps-là, après une immersion dans une faction néonazie qui a failli mal se finir, Fred Flarsky (Seth Rogen), journaliste, apprend que son média indépendant vient d’être racheté par un magnat de la presse mainstream, style Fox News. Intransigeant, il quitte son poste et doit son salut à son meilleur pote qui, pour lui remonter le moral, le traîne à une soirée VIP où les Boyz II Men performent. Et là ! Il revoit Charlotte Field, qui avait l’habitude de jouer les baby-sitters pour lui quand il était jeune ado. Celle-ci l’engage pour pimenter ses discours de quelques blagues bien senties – son armée de conseillères et conseillers ayant remarqué que sa cote « humour » devrait idéalement être relevée de quelques points avant l’annonce de sa candidature à la présidentielle…
Le reste est une suite échevelée de voyages diplomatiques, de gags salaces, de vraies réflexions politiques, le tout enrobé d’un aspect romantico-sexuel, sincère, touchant et même un peu fleur bleue.
Séduis-moi si tu peux ! est un film où l’on peut sauver une situation d’otages en Iran en étant complètement « foncedé », où encore – carrément too much – dire la vérité au peuple américain, et quelle vérité !
Bref, un audacieux mélange de genres, qui passe du vulgaire à l’émouvant, du débile à l’intelligent sans jamais nous perdre en route.
CATHERINE LEMAIRE, LES GRIGNOUX