Une mère de famille bien sous tous rapports se rapproche dangereusement de son beau-fils… Un film à haute toxicité, porté par une magistrale Trine Dyrholm
Depuis qu’elle est venue présenter Nico, 1988 au Sauvenière il y a un peu moins d’un an, Trine Dyrholm garde une place particulière dans notre cœur d’exploitants, pour sa générosité, sa disponibilité et son talent. Elle porte ici de toute sa prestance un rôle particulièrement nocif, qui joue avec nos tabous et notre sens moral.
Elle incarne Anne, qui semble mener une vie confortable et relativement tranquille. Avocate spécialisée, elle est parvenue à trouver un équilibre entre son boulot, ses deux filles, et son mari, Peter. Lui est régulièrement parti à des colloques et Anne a quand même nettement la charge du ménage. Ils ne sont ni trop proches ni complices, mais assez satisfaits de cette vie conjugale paisible et sans accroc.
Peter a un grand fils ado, Gustav, issu d’un premier mariage et, suite à une série de problèmes, il décide, avec l’accord d’Anne, de l’accueillir au sein de leur famille. Gustav est taiseux, il cherche peu le contact et semble rétif à toute idée d’intégration à leur famille.
Anne comprend assez vite qu’il a carrément commis lui-même le cambriolage dont ils viennent d’être victimes. Ni une ni deux, elle le menace de tout révéler s’il ne fait pas plus d’efforts pour la famille…
Et Gustav, d’abord revêche, se prête progressivement au jeu, passe du temps avec ses demi-sœurs et se rapproche insensiblement d’Anne. Elle se met à aimer la présence de cette jeunesse qui lui fait du bien, qui rend parfois le quotidien plus léger, insouciant presque, mais aussi plus trouble, plus excitant. Jusqu’à ce qu’elle se rende compte de l’attirance terrible qu’elle éprouve et ne peut réprouver…
La réalisatrice May el-Toukhy installe une ambiance froide, distanciée, d’un couple modèle avec leurs enfants, pour mieux fissurer cette hypocrite façade par l’éclatement de désirs qui ne peuvent ni se dire ni se réaliser et qui, pourtant, se commettent. C’est malsain, certainement, mais aussi très troublant, ça vient déranger, perturber notre compas moral en explorant la face sombre du désir charnel. Ce personnage d’Anne, au-dessus de tout soupçon moral grâce à sa probité professionnelle, devient progressivement le parangon d’une duplicité délétère et d’une manipulation insidieuse.
LES GRIGNOUX