En racontant l’histoire d’un scénariste corseté par les exigences des studios hollywoodiens et en proie à de violentes crises de colère, Nicholas Ray signe l’une des œuvres phares de sa filmographie
Dixon Steele (Humphrey Bogart) est scénariste à Hollywood. Après une soirée en compagnie de son agent, il invite une jeune femme à son domicile pour discuter d’un roman dont il doit signer l’adaptation. Après quelques heures de travail, elle quitte la demeure de Steele et prend un taxi pour se rendre chez elle. Mais le lendemain matin, elle est retrouvée assassinée au pied d’un ravin… Les soupçons de la police se portent aussitôt sur Dixon, car il est la dernière personne à avoir été vu en sa compagnie. Heureusement, sa voisine, Laurel Gray (Gloria Grahame), lui fournit un alibi, suite à quoi Dixon tombe éperdument amoureux d’elle. Mais l’un et l’autre vont devoir faire face aux pulsions violentes de Steele.
In a lonely place, trop simplement traduit Le violent en français, est un film rare. Comme souvent chez Ray, il décrit le caractère pulsionnel de son héros. Mais au-delà de ce simple constat, c’est aussi le témoignage d’un homme dénonçant les vices de l’industrie du rêve et la difficulté d’être un artiste dans un monde dominé par l’idée de profit.
Dès la première scène – une dispute entre conducteurs où Dixon finit par exploser –, Ray définit son personnage principal par son caractère pulsionnel et violent. Après ce tour de force, nous découvrons le caractère complexe du héros « rayen » : isolé dans un monde dont il se sent rejeté, il n’a de cesse de lutter contre ses démons. À force de contenir ces derniers, ils finissent par ressurgir dans des scènes à la fois fulgurantes et hypnotiques. Car si Ray n’est pas le cinéaste de la violence filmée, il est sûrement celui de la violence suggérée. Il préfère saisir les instants de doute, ceux où les personnages sont prêts à basculer du côté obscur de leurs sentiments.
Nicholas Ray, surnommé « le cinéaste du crépuscule » est un artiste de la limite, et s’il est un domaine dans lequel son art prend forme avec virtuosité, c’est assurément celui des situations de déséquilibre.