Sebastián Lelio, le cinéaste chilien spécialiste des portraits de femmes (Une femme fantastique), réalise le remake américain de son propre film Gloria. Et c’est Julianne Moore que l’on retrouve dans le rôle de cette quinqua célibataire en quête d’amour, d’ivresse et de joie
La cinquantaine frémissante, Gloria est une femme farouchement indépendante. Divorcée depuis plus d’une décennie, mère de deux grands enfants, elle a appris à vivre seule, à trouver son équilibre entre son travail – employée dans une petite compagnie d’assurances – et ses sorties. Car la nuit, Gloria aime danser et s’étourdir dans les dancings pour célibataires de Los Angeles, en quête de rencontres de passage, tentant d’injecter un peu de couleur, de plaisir et de sexe dans une vie que d’aucuns voudraient déjà reléguer au second plan.
Jusqu’au jour où elle croise la route d’Arnold (John Turturro), un ancien instructeur de la Marine reconverti en moniteur de paintball. Fraîchement divorcé, Arnold partage avec Gloria de nombreux points communs et tous deux entament alors une relation, à la fois passionnée mais aussi tendrement maladroite, comme toute personne renouant tardivement avec les aléas des rendez-vous amoureux.
Gloria s’abandonne joyeusement aux délices des premiers émois et bientôt elle invite Arnold à un souper de famille. Mais le soir-même, celui-ci, visiblement mal à l’aise face au lien affectueux qu’elle entretient avec son ex-mari, quitte subrepticement la soirée sans prévenir. L’insouciance des débuts s’estompe alors d’un coup pour laisser place à d’autres tourments…
Dans ce remake, Sebastián Lelio reprend presque plan par plan la trame de son film original situé au Chili. Mais là où son héroïne, interprétée alors par Paulina García, semblait portée par un vent de liberté insufflé par la réminiscence d’années de dictature vécues sous Pinochet, celle qu’interprète Julianne Moore, qui se meut dans un Los Angeles moderne et aseptisé, n’a aucune revanche à prendre sur l’histoire, si ce n’est revendiquer sa place dans un monde qui tend à effacer l’existence des femmes de son acabit.
Si le film se décline comme une comédie romantique, c’est à un humour subtil que nous avons affaire. Le rire, bel et bien présent, se façonne sur le moule d’un quotidien reconnaissable par tous, où l’amour, la joie, aussi à cinquante ans, doivent trouver leur itinéraire parmi les tracas, les petites déceptions d’une vie que l’on voudrait parfois, comme Gloria, beaucoup plus enivrante
LES GRIGNOUX