Subtile invitation au voyage à travers le temps, les paysages, l’humanité, qui commence par ce très beau titre tiré d’un poème du xviie siècle : "Nul homme n’est une île, un tout, complet en soi ; tout homme est un fragment du continent… La mort de tout homme me diminue, parce que j’appartiens au genre humain…"
C’est une Europe aux couleurs naturelles, originelles et pourprées, que nous dépeint ce film, à l’instar de cette sublime fresque du Moyen Âge par laquelle il débute, celle du « Bon et du Mauvais Gouvernement » d’Ambrogio Lorenzetti. Celle-ci raconte les effets du bon gouvernement : harmonieux, ne dissociant pas la gestion de la ville de celle de la campagne ; équitable, joyeux, animé par une démocratie éclairée. Un idéal intemporel, ancré dans l’essence de la vie, qui semble soudain d’une actualité brûlante. À l’heure où l’humanité semble vouloir s’autodétruire, poursuivant les paillettes d’un confort illusoire, on serait tenté de baisser les bras…
Et pourtant ! C’est dans un tourbillon intense et vivifiant que va nous entraîner le réalisateur, à la rencontre d’une poignée d’irrésistibles humains bien décidés à ne pas laisser en pâture ce monde à ceux qui le gouvernent ! Contre vents et marées, ou plutôt contre déboisement et centres commerciaux, les voilà qui s’enracinent, ne cèdent pas. Ils sont d’Italie, de Suisse, d’Autriche, ne se connaissent pas forcément et pourtant, leurs mots se répondent. En Sicile, c’est la coopérative des Galline Felici – Les Poules Heureuses – qui vaillamment bouscule les règles du jeu de la loi du marché. Dans le Vorarlberg, c’est l’improbable « Bureau des questions du futur » qui œuvre au changement. Quant au mouvement des « baukünstler », il développe une nouvelle culture du bâti… Ces pionniers magnifiques nous disent tranquillement, joyeusement, que la solution sera collective ou ne sera pas : nous ne sommes définitivement pas des îles.