Sean Price Williams, directeur de la photographie associé à la frange la plus indépendante du cinéma new-yorkais, signe son premier long métrage, une virée douce et folle au cœur d’une Amérique borderline qui, et l’on cite ici le réalisateur, « n’épuise jamais ses stocks de conneries »
Dans ce film faussement foutraque et très drôle, une jeune fille (formidable Talia Ryder) va d’aventure en aventure au gré du hasard. Elle croisera ainsi la route d’une terroriste persuadée de sauver des enfants des griffes de pizzaïolos pédo-satanistes ; d’un suprématiste blanc et romantique interprété par le délicieux Simon Rex ; ou encore d’islamistes forestiers fans de dance music — un bestiaire a priori absurde et pourtant « tout à fait réaliste », souvent inspiré de gens réels, représentatifs d’une Amérique en delirium tremens permanent, déversant sur les chaînes d’info en continu leurs psychoses, allant de tueries de masse quotidiennes en abjects politicailleries.
Le film a les défauts de ses qualités, partant dans tous les sens sans jamais rien conclure, se foutant superbement de la cohérence, baladant sa démarche syncopée et terriblement sensuelle — le geste toujours somptueux de Williams, qui a propulsé les frères Safdie où ils sont aujourd’hui — en accord avec la folie de l’époque qu’il entend ausculter.
Un film qui s’adresse à tous les cinéphiles curieux qui affectionnent le cinéma indé bordélique, à l’image un peu granuleuse, presque crasseuse. Un cinéma plein de sauvagerie et d’inventivité qui nous happe par sa folie autant que par sa grâce.