Nommé aux Oscars 2024, La Salle des profs nous immerge dans le microcosme d’un collège de province au sein duquel une série d’incidents va mettre à mal le fragile équilibre entre élèves, corps académique et direction. Au cœur de la tourmente : une jeune prof de math persuadée que la solution est dans la recherche de la vérité
Carla Nowak vient d’intégrer un nouveau collège. Elle y enseigne les matières scientifiques et l’éducation physique. Une série de vols perturbe la tranquillité de l’école et Carla assiste, impuissante, à l’interrogatoire de deux délégués de classe à qui l'on demande de dénoncer les coupables. Des méthodes approuvées par la direction et qui la choquent profondément, d’autant que les vols continuent. Carla tente de piéger l’auteur en laissant la webcam de son portable allumée dans la salle des profs…
Les films qui racontent l’univers scolaire sont légion. Le propos de celui-ci est particulièrement intéressant parce qu’il place au centre de son intrigue les valeurs civiques qui sont la base de toute vie en société. Alors qu’elle cherche simplement à trouver le coupable pour mettre fin à des pratiques de délation qu’elle juge détestables, Carla se trouve confrontée à une situation incontrôlable : ses collègues lui reprochent d’avoir violé le caractère privé de leur lieu de travail, la direction est obligée de prendre des mesures radicales qui bouleversent complètement l’univers de l’établissement et des élèves qui cherchent à comprendre et se raccrochent à des rumeurs. Face à ces conséquences en chaîne, elle tente de ménager les coupables, mais aussi de protéger les élèves en taisant la situation. Elle est bientôt désignée comme celle qui a provoqué ce maelström.
Au fil du récit, l’atmosphère se tend et l’angoisse de Carla devient la nôtre. À travers une mise en scène nerveuse, et grâce à une caméra qui ne lâche jamais la principale protagoniste, on est envahi par le sentiment de malaise qui gagne bientôt tout le collège. « Ce qui se passe dans la salle des profs, reste dans la salle des profs », dira Carla à un élève qui l’interviewe pour le journal de l’école. À l’instar de Laura Wandel (Un monde) qui était parvenue à recréer le microcosme de la cour de récréation, İlker Çatak nous immerge dans celui de la salle des professeurs, espace unique avec ses propres lois, qui apparait aussi comme une métaphore de la justice et du pouvoir.
LAURENCE HOTTART, les Grignoux