Dans un petit village du Sénégal, ils s’aiment d’un amour fou. Mais la passion peut-elle résister au poids des traditions ? Entre le conte et la tragédie, un premier film surprenant, présenté en compétition au Festival de Cannes et tourné en langue peule
Banel et Adama s’aiment. Ils vivent dans un village éloigné au nord du Sénégal. Du monde, ils ne connaissent que ça, en dehors, rien n’existe. Mais l’amour absolu qui les unit va se heurter aux conventions de la communauté. Car là où ils vivent, il n’y a pas de place pour les passions, et encore moins pour le chaos…
Seul premier long métrage en compétition officielle cette année à Cannes, Banel et Adama, de Ramata-Toulaye Sy, mêle le conte et la tragédie, pari risqué qui court mille fois le péril de la joliesse et du dialogue appliqué (ah là là, c’est compliqué d’invoquer légèrement le destin), mais le déjoue, parfois in extremis, grâce à un personnage féminin dont la grâce cache à la fois un secret dévorant et une force insoupçonnable. Il en faut quand on prétend s’opposer à la famille, aux traditions, à la répartition genrée des tâches. Avec Adama, qui a décliné le rôle de chef lui revenant de droit, ils projettent de s’installer à l’orée du village, dans une maison ancienne ensevelie sous le sable. Mais à mesure qu’ils l’exhument, la sécheresse frappe, les bêtes meurent, et bientôt les gens…
Tourné en langue peule avec des acteurs non professionnels dans la région rurale du Fouta, le film surprend dès lors qu’il semble dérailler. Quand Banel, que l’on croyait inquiète, devient inquiétante et dégomme un oiseau perché sur une branche, ou se met à dézinguer des lézards au lance-pierre avant de les jeter au feu. Le danger rôde et il s’appelle amour fou.