Présenté au festival de Berlin, Reality met en scène la retranscription réelle de l’interrogatoire, à son domicile et par le FBI, de Reality Winner, lanceuse d’alerte américaine jugée en 2018. Un film fascinant qui oscille entre thriller psychologique, true crime et étude très contemporaine sur le genre. Une foudroyante révélation
Tout est incroyable dans cette histoire vraie, à commencer par le nom de sa principale protagoniste : Reality (interprétée par l’actrice Sydney Sweeney, vue dans les séries Euphoria et The White Lotus). Le 3 juin 2017, elle a 25 ans quand, de retour chez elle à Augusta, Georgie, après quelques courses, elle trouve deux agents du FBI devant sa porte. C’est là que démarre l’enregistrement à partir duquel la dramaturge et cinéaste américaine Tina Satter a puisé son film. Alors que les dialogues suivent, à la virgule, au bafouillement près, les retranscriptions de l’enregistrement, la caméra de Tina Satter, patiente, vient gratter du côté des non-dits, mettant en place un étrange et captivant jeu du chat et de la souris. La souris, on le comprend rapidement, est ici soupçonnée d’avoir fait fuiter des documents à la presse.
Suite à la curieuse proposition des agents du FBI de poursuivre l’interrogatoire à son domicile, ceux-ci s’installent dans une pièce vide à l’arrière de la maison de Reality. Cet élément bien réel de l’histoire devient le formidable ressort narratif de la seconde partie du film, la cinéaste investissant cette pièce vacante et mystérieuse comme une représentation de l’espace mental de Reality. C’est aussi dans cette pièce que s’affirme l’une des grandes forces du film, à savoir son discours extrêmement fin sur les rapports de genre. Car, même si les agents du FBI se sont montrés plutôt bienveillants, les échanges enregistrés ce matin-là sont parsemés de légers flottements, de discrets sous-entendus genrés, finement soulignés par la mise en scène. Il faut alors se rappeler que Reality Winner a été la première lanceuse d’alerte condamnée en application de l’Espionage Act, sous le mandat de Donald Trump, pour prendre toute la mesure de la charge puissamment politique du film.
>> À partir de sa date de sortie (voir fiche technique ci-dessus), vous pouvez considérer que ce film sera visible au minimum durant 3 à 4 semaines dans les salles des Grignoux.
>> Film programmé uniquement dans nos salles liégeoises