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Adapté du roman éponyme de Miriam Toews, Women Talking ne saurait être réduit à un simple film de procès dont il emprunte la forme. Sarah Polley va plus loin et compose, par-delà son réquisitoire contre la violence sexuelle institutionnalisée, un manifeste déchaîné pour l’avènement du matriarcat. Nommé à l’Oscar du meilleur film 2022
Circonscrit dans une unité de temps et de lieu, Women Talking suit durant quelques heures un groupe de femmes mennonites dans une colonie religieuse isolée, qui se rassemblent pour lutter et concilier leur foi avec une série d’agressions sexuelles commises par les hommes de la colonie. Ce n’est qu’une question de temps avant que la caution de ceux-ci ne soit payée et elles doivent coûte que coûte se décider entre subsister au sein de la communauté et se battre, ou quitter leur foyer de toujours pour un nouveau départ alors même qu’elles ne détiennent aucun code du monde extérieur (elles ne savent ni lire ni écrire). Elles ont quarante-huit heures devant elles pour arriver à une décision qui changera à tout jamais leur vie et celle de leurs enfants. Les femmes se retrouvent donc barricadées dans une grange pour se protéger d’une menace indicible qui ne cesse de les harceler de toutes parts.
Le film se mue alors en un huis clos psychologique, exacerbant les personnalités, les affinités et les rivalités de chacune de ces femmes (parmi lesquelles on retrouve les visages des actrices Ronney Mara, Claire Foye ou Frances McDormand) qui refusent d’être considérées comme martyrs mais au contraire comme précurseuses d’un ordre social nouveau : le matriarcat.
Elles savent toutes qu’elles sont les victimes de la folie des hommes, de leur violence inouïe, que la réalisatrice prend soin de ne jamais montrer de manière frontale. Et ces quelques heures de discussion sont déjà pour elles une manière de revendiquer leurs droits, une tentative édifiante d’émancipation. Contempler ces femmes désireuses de revendiquer pour elles-mêmes un petit espace dans lequel elles sont autorisées à penser, à exiger la sécurité, à élever correctement leurs jeunes garçons, c’est tout le projet de Sarah Polley, et peut-être peut-on trouver dans cet exil une forme d’élévation.
