D’une richesse inouïe, ce chef-d’œuvre de David Lynch est un voyage cauchemardesque dans les dédales de la machine hollywoodienne pervertie par l’ambition et les apparences. Vingt ans après sa sortie, ce trip esthétique n’en finit pas de fasciner. Du pur cinéma !
Un violent accident de voiture sur la route de Mulholland Drive sauve une femme de ses poursuivants. Hagarde, elle s’enfonce dans la nature et se réfugie dans une demeure inoccupée. Le lendemain, Betty Elms débarque à l’aéroport de Los Angeles. Actrice, elle compte bien devenir une star, et sa tante, partie sur un tournage, lui prête son appartement. Dans la salle de bains, Betty découvre avec surprise l’accidentée, terrée et terrifiée. Prise de compassion pour l’infortunée, qui se révèle amnésique, elle décide de l’héberger tout en l’aidant à retrouver peu à peu des bribes de son passé. Leurs seuls indices résident dans un sac rempli d’argent et une mystérieuse clé bleue...
La complexité de l’histoire (dont plusieurs indices nous laissent entrevoir l’irréalité) est relative. Il s’agit de la lutte contre le Mal, qui finit par pervertir le monde et l’esprit de la pure Betty. Tout est double dans le film : le rêve américain et son envers, la blonde et la brune, l’innocence et la corruption, les maisons aux belles façades et leur mur arrière décrépi. Il y a encore et surtout le fantasme, l’idéal rêvé, et la réalité qui n’est que frustration et infidélité. Réflexion sur l’art et ses illusions ainsi que sur la condition de l’artiste, le film montre la nécessaire anthropophagie du comédien obligé d’assimiler le monde qui l’entoure et la vie des autres pour faire exister son personnage. Afin d’illustrer son propos, David Lynch évoque deux œuvres maîtresses : Persona d’Ingmar Bergman, à qui il emprunte le thème du double et de l’échange de personnalité, et Sunset Boulevard de Billy Wilder, qui évoquait déjà l’univers du cinéma, son arrivisme et sa folie.
D’après AVOIR-ALIRE.COM