À travers l’histoire d’une jeune femme malade qui refuse de suivre un parcours hospitalier classique, ce film d’amour déchirant se veut aussi une déclaration à la beauté de la vie. Dans les rôles principaux, Vicky Krieps et le regretté Gaspard Ulliel incarnent un couple uni jusqu’au bout face à l’adversité
Hélène et Mathieu sont heureux ensemble depuis de nombreuses années. Le lien qui les unit est profond. Confrontée à une décision existentielle, Hélène part seule en Norvège pour chercher la paix et éprouver la force de leur amour…
On vous prévient d’emblée : Plus que jamais est émotionnellement fort, très fort. Il nous accompagne longtemps après la vision, tant il fait écho à notre intimité la plus secrète. Le voyage intérieur qu’il nous propose de suivre, celui d’une jeune femme face à son destin, est propice à soulever beaucoup de questions sur notre statut d’être fragile et mortel, sur les priorités à donner à notre existence et à ce que nous partageons avec l’être aimé. L’histoire se passe au milieu de paysages norvégiens que l’on associe à la tranquillité et à l’inquiétude, car ils sont autant magiques qu’imposants. Comme son héroïne qui refuse l’attendu, le film se détourne des codes du mélodrame pour ceux de la chronique existentielle, et renvoie à un certain cinéma asiatique intimiste où la nature exprime le subconscient des personnages. La volonté de la réalisatrice est de raconter une histoire qui, certes, explore un thème grave, mais en faisant en sorte que rien ne semble acquis, que la vie présente dans tous les plans puisse encore avoir le dernier mot sur ce fichu hors champ, la mort. Très réaliste, le film s’inscrit dans la terre ferme de la vie de tous les jours et il nous fait tout comprendre par la suggestion, ce qui fait beaucoup travailler notre imaginaire.
Est-ce que, parfois, tout cela ne finirait même pas par emmener le réel dans une autre dimension, plus impalpable ? Le temps s’étire agréablement pour imprimer dans notre regard, et de façon plus définitive encore, cette vie devenue si modeste, où le moindre geste est beau et essentiel. Ici, respirer est un acte révélé dans ce qu’il a de plus fondamental, où l’on comprend là-haut, au sommet d’une montagne, au summum de la solitude, que la vie et la mort avancent tout le temps côte à côte. Hélène a trouvé un nouvel espace pour réaliser son voyage personnel, sans celui qu’elle aime. Que cette séparation soit vécue avec compréhension par son compagnon est une idée magnifique qui fait de l’amour et du couple les deux sujets clés. Dans le rôle d’Hélène, Vicky Krieps témoigne une nouvelle fois de son talent immense pour incarner des personnages fragiles et sensibles, par un jeu sobre et en laissant à la caméra le soin de capter la beauté grave de son regard. Mathieu est magnifiquement incarné par Gaspard Ulliel, quelques mois avant son décès brutal. Suivre l’histoire d’un couple en plein doute qui combat l’adversité, en sachant ce qui est arrivé à Gaspard Ulliel, rend le film encore plus émouvant. À l’image de son titre en forme de cri du cœur salvateur, Plus que jamais est bien une ode à la vie, si lumineuse et forte dans sa capacité à défier l’irrémédiable.
NICOLAS BRUYELLE, les Grignoux