Les frères Boukherma, réalisateurs de Teddy, déclinaison du mythe du loup-garou dans une bourgade des Pyrénées, revisitent aujourd’hui Les Dents de la mer sur une plage des Landes françaises. Entre film de genre et chronique d’un village du littoral, L’Année du requin dynamite les codes de la comédie française !
En trois longs métrages – le premier, Willy 1er, n’est pas sorti en Belgique –, Ludovic et Zoran Boukherma ont su imposer leur patte singulière dans le cinéma français. Leur univers, qui se situe quelque part entre la farce provinciale et le conte fantastique, entre Steven Spielberg et Bruno Dumont, est d’une originalité folle et pour le moins délurée.
On retrouve dans L’Année du requin ce sens du burlesque, cette affinité pour les accents régionaux, les corps et les gueules qui n’ont rien de lisse, mais qui, au contraire, transportent avec eux, par leur imposante et irrégulière posture, tout un imaginaire comique.
Nous suivons ici Maja (Marina Foïs), gendarme maritime dans les Landes, qui s’apprête, à presque 50 ans, à prendre sa retraite anticipée. Son mari, Thierry (Kad Merad), a déjà prévu la place de camping et le mobil-home et attend ce moment avec impatience. Mais la disparition d’un vacancier va mettre toute la côte en alerte : un requin rôde dans la baie ! Maja, qui a espéré toute sa carrière une mission d’une telle ampleur, décide de repousser quelque peu sa retraite pour attraper ce requin…
Outre cette chasse au requin, qui demeure le motif phare du scénario, c’est évidemment tous les à-côtés dramaturgiques qui font la saveur du film. Notamment comment l’annonce de cette menace va se heurter à cette population du bord de mer qui n’a vraiment pas envie qu’on lui gâche son été, d’autant plus que la pandémie de Covid-19 a ruiné le précédent, et que les habitants sont, comme chaque année, envahis de Parisiens qui parasitent leurs plages.
Bien qu’il ne se déploie pas uniquement sur un registre humoristique, L’Année du requin souffle un vent de fraicheur dans la comédie française en nous faisant naviguer entre les genres, en déjouant parfois les attentes créées par le scénario, mais surtout en pratiquant un humour décalé détonnant qui n’a pas fini de nous réjouir.
ALICIA DEL PUPPO, les Grignoux