Prix Spécial du Jury à la Mostra de Venise 2021
À la fois pastorale magnifiant les étendues du Pollino, en Calabre, et réinvention du long métrage histrique, Il buco bat en brèche une certaine idée de la reconstitution au cinéma
Dans les années 1960, l’Italie célèbre sa prospérité en érigeant la plus haute tour du pays. En parallèle, de jeunes spéléologues décident, eux, d’en explorer la grotte la plus profonde. À 700 mètres sous la terre, ils passent inaperçus pour les habitants alentours, mais pas pour l’ermite de la région, un vieux berger. Ils tissent avec lui des liens d’un genre particulier…
Les chroniques d’Il buco retracent les découvertes et parcours au sein d’un monde inconnu, celui des profondeurs, où se mêlent nature et mystère. Les gestes des paysans, leur rythme au fil des saisons, l’aspect prosaïque du quotidien : tout décrit une vie que le réalisateur refuse de fossiliser en images. Seules des archives liminaires en noir et blanc permettent une datation de la narration. Mis à part cela, le réalisateur transalpin utilise les moyens du documentaire pour baigner le spectateur dans un présent continu, avec cette idée forte que le cinéma localise plus qu’il ne date. Le lieu, la recherche des décors, une certaine authenticité géographique priment sur le temps que l’artiste travaille en une poésie de l’instant. L’expédition spéléologique, métaphore de la modernité, se transforme vite en un voyage topographique où le ludique côtoie le graphique. Une partie de football au-dessus de la fosse qu’explorent les scientifiques, les jeux de la plume et de l’encre à l’écran pour dessiner la carte du gouffre exploré : Il buco se déroule entre le silence et des dialogues ordinaires dénouant toute efficacité scénaristique ou sensori-motrice. Une œuvre aussi atypique que gracieuse.