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En roue libre est une jolie comédie décalée et sentimentale en forme de road movie sur fond de crise existentielle, portée par le duo Marina Foïs-Benjamin Voisin, géniaux compagnons de route malgré eux
Un beau matin, au pied de son immeuble, Louise est prise au piège dans sa propre voiture. Elle est comme terrassée par une attaque de panique dès qu’elle veut en sortir. Non, ce n’est pas une blague : quoi qu’elle tente, Louise n’arrive plus à sortir de son véhicule, elle est bloquée, elle a irrationnellement peur. Paul surgit brusquement, vole la voiture et, du coup, kidnappe Louise. Il doit se rendre au Cap Ferret, et il s’y rendra malgré lui en compagnie de Louise…
Une bonne idée de départ dans un scénario, surtout quand elle est étonnante, c’est à la fois rassurant et piégeux pour le réalisateur. D’un côté, il se met le spectateur dans la poche dès les premières secondes, ce qui n’est pas du luxe lorsqu’il s’agit d’un premier film, comme ici. De l’autre, une petite voix lui susurre à l’oreille qu’il va falloir bosser pour tenir sur la longueur, car l’attente est directement très forte. Dans une veine absurde et décalée proche de celle empruntée par Quentin Dupieux, dans laquelle se seraient toutefois engouffrés de vrais sentiments, ce road movie attachant raconte la reconstruction de deux personnalités solitaires,toutes les deux marginales à leur façon, ne rentrant pas dans le moule de la société.
C’est un film de son temps qui raconte clairement le burn-out et c’est tout à son honneur (et son audace) d’en parler avec humour, sans jamais en minimiser les dégâts psychologiques. L’important, on le sait, ce n’est pas l’arrivée, mais le chemin parcouru. Le film dégage un réel charme qui doit beaucoup à la qualité de l’interprétation. Marina Foïs, assurément l’une des meilleures comédiennes de sa génération, joue avec ce mélange de fragilité et de légèreté cette héroïne blessée, incapable d’affronter la noirceur du monde. Quant à Benjamin Voisin (Illusions perdues), il mélange intensité et nervosité dans son personnage d’écorché vif à la tendresse désespérée. Par un beau sens de l’écriture, le réalisateur construit deux personnages qu’il rend bien plus importants que l’histoire en elle-même. Comme eux, son film tient debout jusqu’au bout et alterne moments cocasses et sentimentaux, sans lourdeur ni temps morts, sans jamais ressembler à une accumulation de petites séquences indépendantes. Il réussit une comédie décomplexée, sans prétention, joyeuse et sentimentale qui fait marrer tout en réchauffant les cœurs. En roue libre arrive en plein été et ça ne pouvait pas mieux tomber.
NICOLAS BRUYELLE, les Grignoux
