Prix FIPRESCI dans la section Un Certain Regard au Festival de Cannes 2021
Immersion folle dans une cour de récré, Un monde nous plonge au cœur des cruautés de l’enfance. Un récit puissant et d’une sincérité implacable ! Le film a remporté le prix de la critique internationale au dernier Festival de Cannes
Le monde que décrit Laura Wandel, c’est celui d’une école primaire : un microcosme apparemment innocent et joyeux, à l’intérieur duquel adviennent pourtant les pires cruautés.
Le film commence devant les grilles de cette école bruxelloise dont nous ne quitterons jamais l’enceinte. Nora, 6 ans, entre en primaire. Elle serre fort son papa qu’elle ne veut pas quitter. Son grand-frère Abel l’accompagne et tente de la rassurer. Elle finit par céder et suivre l’institutrice qui, la tenant par la main, l’introduit dans ce monde en soi qu’est l’école, l’un des tout premiers lieux où l’enfant apprend à socialiser.
Nora est une petite fille timide, discrète et craintive. Mais elle s’adaptera assez facilement à ce nouvel environnement. Nous la suivrons tout au long du film, toujours au plus près de son regard et de son vécu.
Laura Wandel parvient brillamment à reconstituer l’atmosphère, mais aussi l’expérience des activités scolaires : les vestiaires de la salle de sport où l’on s’habille maladroitement, les frissons que l’on ressent en attendant son tour au cours de natation, les tartines un peu tristes que l’on mange au réfectoire… Les détails sont d’une acuité folle, nous rappelant en quelques secondes à quel point être petit, c’est être vulnérable.
Et puis il y a la cour de récré où, entre le foot et la corde à sauter, Nora remarque un jour que d’autres garçons violentent son frère… Une violence sans motif et qui, pourtant, va se répéter. Poussée par un désir de protection, Nora veut agir, mais Abel, honteux et effrayé, l’en empêche. Bientôt, il deviendra la bête noire de sa classe. Et Nora de composer avec des sentiments contrariés, entre la souffrance de voir son frère subir une telle humiliation et l’angoisse de ne pas pouvoir l’aider.
En filmant cette histoire de harcèlement à hauteur d’enfant, Laura Wandel crée un point de tension permanent, installant le spectateur dans le même inconfort que celui de Nora, et le renvoyant inévitablement à sa propre mémoire, à sa propre cour de récré, là où demeure peut-être l’enfant martyrisé ou cruel qu’il a été.
ALICIA DEL PUPPO, les Grignoux