En choisissant l’angle du drame familial, Jasmila Žbanić nous invite à partager l’angoisse d’une population qui sera bientôt victime d’un terrible génocide
Bosnie-Herzégovine, 10 juillet 1995, trois ans après le début de la guerre. Nous sommes à la veille de la prise de Srebrenica et du massacre de plus de huit milles hommes et adolescents bosniaques par l’armée serbe du général Ratko Mladić. Terrifiée, la population du village afflue massivement sur la base des Casques bleus néerlandais installée aux abords de la ville mais, rapidement saturée, celle-ci referme ses grilles sur plus de vingt mille habitants désormais contraints de rester à l’extérieur, à la merci des Serbes.
Censées maintenir la paix dans cette petite enclave musulmane, les forces de l’ONU peinent alors à obtenir les moyens nécessaires à l’exercice de leur mission et cèdent peu à peu à la pression serbe en acceptant l’évacuation des réfugiés. L'ONU choisit ainsi de mettre à l'écart les hommes et les adolescents, cela même en dépit du sort évident qui les attend. Parmi les personnes qui ont l’opportunité de séjourner à l’intérieur du camp, Aida, une enseignante réquisitionnée pour servir d’interprète aux soldats de l’ONU. Chargée de traduire les consignes et de rassurer la foule, Aida pressent instinctivement le pire et, à défaut de pouvoir aider l’ensemble de ses concitoyens, tente par tous les moyens de protéger son mari et ses deux fils adolescents de la tragédie qui se prépare.
C’est précisément à travers le regard clairvoyant de cette mère de famille et le combat désespéré qu’elle mène pour préserver ses proches que nous vivons ces journées funestes.