Quand la mort d’une grand-mère entraîne une petite fille dans un voyage délicieusement surnaturel vers… l’enfance de sa mère. 72 minutes d’une délicatesse inouïe.
La mise en route de l’intrigue est aussi limpide que rapide. Elle donne le ton des 72 minutes à venir, d’un récit ramassé donc et pourtant incroyablement riche. Sans longueur inutile ou répétition mais rempli de pistes qui peuvent vous amener loin, très loin, sans même que vous vous en rendiez compte. Nelly (Joséphine Sanz, captivante), une petite fille de 8 ans, passe de chambre en chambre dire au revoir aux pensionnaires d’une maison de retraite avant d’arriver dans une chambre vide où se trouve sa mère. On saisit, sans besoin de le formuler par des mots, que ces au revoir sont en fait des adieux. Sa grand- mère tant aimée vient de mourir et il va falloir partir vider avec ses parents sa demeure qui fut de fait la maison d’enfance de sa mère.
Dans ces premiers moments, la tristesse affleure. Chez Nelly, tout autant que le vide que cette mamie adorée va laisser, il y a le regret de ne pas lui avoir dit correctement au revoir. Et puis il y a cette maison et ces bois environnants, cet espace des jours heureux où on comprend que sa mère a passé sans doute les plus beaux moments de sa vie, à construire une cabane qui était devenue son refuge.
C’est en allant justement dans les bois à la recherche de la cabane de sa mère qu’elle rencontre Marion une autre petite fille de son âge. Entre elles, le coup de foudre amical est immédiat comme si elle se reconnaissait. Les deux petites vivront ensemble quelques jours insouciants, faits de rires et de jeux fidèles aux moments insouciants de l’enfance.
Cette escapade inattendue raconte la beauté enveloppante du film de Sciamma. Sa capacité d’abord à écrire et filmer à hauteur d’enfants. Celle qui fut la coscénariste de Ma vie de Courgette les donne à voir dans un naturel fascinant. Cela explique pourquoi le surnaturel surgit ici sans jamais briser la ligne claire du récit, ni comme un rebondissement mais comme le prolongement d’une apparente chronique sur le deuil qui se métamorphose en récit initiatique.
Mais rien ici ne passe par la cérébralité. Tout est affaire de sensations, de détails poétiques à chaque coin de plan, d’une atmosphère propice à l’abandon et au retour vers sa propre enfance. Et si en 72 minutes elle avait signé son plus beau film à ce jour ?