En plein cœur des Cévennes, Elsa Maury suit le quotidien d’une « petite » éleveuse d’un troupeau de moutons, exposant les gestes d’un métier aujourd’hui peu pratiqué à cette échelle. Son film nous montre que l’élevage est aussi un rapport à la mort, même s’il est conçu de la manière la plus respectueuse qui soit
De la naissance des agneaux à la mort des moutons ou des brebis, de l’élevage dans les prés, au passage par l’abattoir, jusqu’à l’arrivée dans l’assiette, Nathalie pratique ce métier d’éleveuse dans la tradition, à une échelle considérée comme « humaine ». La réalisatrice nous propose une narration épurée, sans voix off, en totale immersion dans la réalité de cette éleveuse. Nathalie est sensible, attachante et attachée à ses bêtes. Elle a une vie modeste, proche de la nature, elle nage à contre-courant. Mais Elsa Maury ne dresse pas un portrait enjolivé du métier, au contraire, elle nous en montre toute la dureté, la complexité matérielle et sentimentale, et soulève des questions fondamentales sur notre rapport aux autres espèces.
Ce film raconte aussi que pour manger de la chair animale il faut se confronter à ce que cela représente, ne pas fermer les yeux, ne pas se laisser influencer par les pratiques d’hygiénisation du XXe siècle qui veulent que les animaux soient présentés comme abstraits pour pouvoir les consommer. Après la vision de ce film, les questions perdurent, bien évidemment, en fonction du rapport que le spectateur entretient avec la consommation de viande. Que signifie un élevage respectueux ? Que veut dire bien tuer, bien consommer ?
LUDIVINE FANIEL, les Grignoux
Photos ci-dessous de la projection de ce 16/9 au cinéma Caméo en présence d'Elsa Maury et Anne-France Couvreur & Valentine Givron, « Les Bel’gères ».