Comprendre l'histoire

Le souvenir que le spectateur garde d'un film est généralement d'autant plus prégnant qu'il en perçoit la cohérence, cohérence fondée sur un enchaînement logique de faits qu'il est aisé de retracer. Un film aussi dense que Le Maître des éléphants, qui met en scène de nombreux personnages parfois énigmatiques, parfois ambigus, qui mêle plusieurs intrigues dont le sens nous échappe en partie, qui laisse intentionnellement un grand nombre d'informations dans l'ombre, aura sans doute laissé aux jeunes spectateurs un lot de souvenirs isolés et désorganisés par rapport à l'ordre chronologique du récit. Ainsi bien des scènes sont-elles difficiles à connecter tant les liens de cause à effet qui les relient sont éludés par le réalisateur. Ce parti pris peut induire une perception du film assez éclatée, débouchant sur des souvenirs épars et sans doute moins nombreux que ceux qui seraient conservés après la vision d'un film plus linéaire et transparent sur le plan de l'intrigue et des motivations des personnages. Ce type de film, certainement le plus courant dans la production de films pour enfants, permet de remonter beaucoup plus aisément le fil de l'intrigue et d'un retracer un schéma simple. Le souvenir de scènes secondaires ou de détails émerge alors sans difficultés ni effort de mémoire, tant ils s'intègrent naturellement au paysage d'ensemble du film.

Au contraire, dans Le Maître des éléphants, le «puzzle» comporte un nombre assez important de pièces énigmatiques et difficiles à situer. Certaines scènes, unies par une logique implicite, peuvent ainsi être mal interprétées ou même sembler vides de sens : quel fait, quel acte, quelle volonté se trouve à l'origine de telle situation ? Il n'est pas toujours simple de répondre à ces questions et d'identifier toutes les motivations.

Cette absence de causalité directe, évidente, expliquera sans doute une certaine anarchie, un certain désordre dans la reconstitution du récit telle que les enfants pourront l'entreprendre. Cette relative « désorganisation » va nécessairement de pair avec une perte d'informations plus ou moins importante, qui variera selon le degré de compréhension du film : certains détails par exemple, essentiels dans la consécution des faits, peuvent rester enfouis dans la mémoire simplement par manque apparent de pertinence, dû lui-même à une méconnaissance d'un contexte culturel étranger et inhabituel au cinéma.

Par contre, nombre de scènes présentent une cohérence interne. Retenues pour leur facilité de lecture ou leur importance dans la progression du récit — songeons par exemple aux deux expéditions nocturnes menées par les enfants — celles-ci seront autant de points de repère stables, fondamentaux dans la reconstitution du film.

Le but des activités que nous proposons dans ce chapitre sera essentiellement d'aider les élèves à organiser leurs souvenirs pour retrouver une signification d'ensemble du film. En dessiner la structure pour mieux en percevoir l'unité constituera l'étape principale d'un long travail de clarification de l'intrigue.

A. La liste artistique

Dans ce cadre de recomposition du film, demandons-nous d'abord « qui est qui », de façon à éviter toute une série de confusions possibles.

Comme document, soumettons aux élèves la liste artistique qui répertorie l'ensemble des protagonistes du film et le personnage qu'ils ont eu à incarner.

Un premier coup d'œil montrera que l'organisation de cette liste ne semble répondre à aucun des critères traditionnels de classification (ordre alphabétique des noms d'acteurs, ordre alphabétique des noms de personnages, ordre d'apparition à l'écran...). Interrogeons-nous dès lors à propos du critère qui a bien pu présider au classement des noms. Rapidement nous comprenons que les premiers personnages cités ont joué un rôle important dans le film, un rôle dont nous nous souvenons bien. Par contre, plus on avance dans la liste, plus nous éprouvons des difficultés à remettre des visages sur les noms; parfois même, il peut arriver que nous ayons tout oublié de l'un ou l'autre de ces personnages. Par exemple, chacun peut-il dire quel rôle joue Fobena ? Quand intervient le médecin, ou le journaliste ? Qui est Bidunte ? À quel moment le capitaine entre-t-il en scène, et de quel type de capitaine s'agit-il ? Pour répondre à toutes ces questions, ouvrons un premier débat dans la classe et ensemble, tâchons de recomposer tous ces portraits avec le plus d'exactitude possible.

Une fois les principaux personnages bien définis quant à leur identité et leur rôle, demandons à chacun de transcrire ces informations sous forme d'un tableau. Lors des étapes ultérieures, celui-ci pourra constituer un petit guide précieux. Prolongeons ainsi horizontalement la liste artistique, qui comprend déjà une colonne « acteurs » et une colonne « personnages », de deux autres colonnes. Dans une troisième colonne, chaque élève notera le rôle précis tenu par chaque personnage, excepté bien sûr pour tous ceux qui n'ont pas de nom et qui sont désignés d'emblée par le rôle qu'ils tiennent dans le film (le sorcier, l'apprenti sorcier, le médecin, le journaliste, le proviseur, le capitaine et les trois professeurs).

Enfin dans une quatrième colonne seront indiquées les circonstances précises dans lesquelles ces personnages sont intervenus.

Bien entendu Garoubier et Martin, qui représentent les protagonistes centraux de l'histoire, ne feront pas l'objet d'un tel travail.

B. Le film comme un puzzle

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C. Exploitation du schéma : rétablir les connexions, dégager des hypothèses

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D. Utiliser le découpage séquentiel

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