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Extrait du dossier pédagogique
réalisé par Les Grignoux et consacré au film
Je n'aime plus la mer
d'Idriss Gabel
Belgique, 2018, 1h08

Ce dossier pédagogique s'adresse aux enseignants qui verront Je n'aime plus la mer avec de jeunes spectateurs entre dix et treize ans environ. Il propose plusieurs activités à mener en classe avant et après la projection.

L'extrait du dossier proposé ci-dessous revient plus particulièrement sur le caractère particulièrement émouvant des témoignages recueillis.

Des témoignages émouvants

Une grande émotion se dégage des témoignages recueillis dans Je n'aime plus la mer. Les enfants jettent en effet sur leur propre parcours un regard profondément naïf et sincère qui reflète une réalité bien éloignée des représentations qui circulent à propos des réfugiés.

À la fois nostalgiques de la vie qu'ils menaient avant que la situation se détériore dans leur pays d'origine et traumatisés par un départ précipité et un périple long, difficile et dangereux, tous les enfants éprouvent des sentiments contradictoires, partagés entre la souffrance d'un déracinement qui les a coupés de leur entourage et de leur environnement, le bonheur d'être accueillis dans un cadre qui leur permet de vivre en sécurité et l'angoisse ressentie face au caractère provisoire de leur situation, lié à l'issue qui sera donnée à leur demande d'asile et sur laquelle ils n'ont aucune prise.

C'est la manière dont tous ces témoignages et l'émotion qu'ils contiennent ont été reçus par les jeunes spectateurs que nous souhaitons maintenant aborder au travers de l'activité développée ici.

Concrètement

Invitons les élèves à déterminer individuellement, à partir d'un répertoire de situations décrites par les enfants vus dans Je n'aime plus la mer, la nature et l'intensité des émotions qu'ils ont ressenties à la vision du film. À cette fin, distribuons-leur à chacun un exemplaire de la liste suivante et demandons-leur d'évaluer à quel point ils ont été touchés par les éléments de leurs récits.

Ouvrons ensuite une discussion en grand groupe qui permettra aux enfants de partager leurs ressentis et de débriefer autour de l'activité : qu'ont-ils ressenti ? Se sentent-ils émus par ces témoignages ? Peuvent-ils imaginer vivre des situations comparables ? Que voudraient-ils faire après avoir entendu ces témoignages ?

Proposons-leur enfin d'approfondir la découverte de la réalité des demandeurs d'asile en regardant les capsules vidéo réalisées par Idriss Gabel dans le prolongement de son film. Son souci de mettre cette réalité à hauteur d'enfants a en effet amené le réalisateur à recueillir leurs réactions (au centre, en classe…) suite à la vision de Je n'aime plus la mer, en leur demandant notamment ce qui, selon eux, manquait au film. Dans un second temps, il les a invités à réaliser des micro trottoirs à partir de leurs propres questions. Les résultats, à la fois drôles et interpellants, constituent une excellente base pour poursuivre le débat avec les jeunes spectateurs.

Le témoignage des enfants :
quelques éléments de leurs récits

Quelle émotion as-tu ressentie face aux situations suivantes : tristesse, surprise, état de choc, colère, peur, tendresse, compassion, dégoût… ? Note à chaque fois l'intensité de tes émotions en indiquant un chiffre de 1 à 4

Elle/Il… raconte que… Émotion
&
Intensité
Yalda
(sœur de Güzal)
elle était heureuse en Afghanistan ;
… elle avait un petit chat ;
… les talibans ont frappé son père et pris l'or de sa mère ;
… le bateau sur lequel ils avaient embarqué était troué et il se dégonflait ;
… son peuple lui manque beaucoup : elle voudrait des amis afghans.
?
Lisa … elle vivait en Afghanistan dans une maison avec un grand jardin et deux chiens ; … des voleurs ont pris leur argent et menacé ses parents de l'enlever ; … son père a disparu pendant la nuit et elle ne l'a plus jamais revu. ?
Mohamed … il était heureux en Irak ; … il vivait dans une belle maison ; … à l'arrivée de Daesh, il a eu peur qu'ils ne mettent le feu à sa maison et qu'ils ne tuent toute sa famille ; … son père a disparu et personne ne sait ce qu'il est devenu ; … à Bagdad, les gens n'ont plus peur des attentats ; ils se sont habitués aux cadavres qui jonchent le sol et plus personne ne fait attention. ?
Hassan … il y a beaucoup d'attentats meurtriers en Irak, surtout à Bagdad ;
… son ami a été tué par un sniper, juste devant lui ;
… il a peur pour son pays, exposé aux bombes, aux massacres, aux enlèvements, aux assassinats…_;
… en Irak, il est terrifiant de sortir de chez soi ;
… le Commissariat aux Réfugiés a refusé sa demande d'asile parce qu'il n'y aurait pas de danger pour lui en Irak.
?
Aicha (sœur d'Ali) … elle a écrasé un squelette dans le noir alors que, fuyant l'Irak avec ses parents et son petit frère, ils tentaient de gagner l'Europe ;
… dans un magasin où elle faisait des courses avec sa mère, en Afghanistan, il y avait une bombe à côté d'elles, qui a explosé juste après leur départ ;
… suite à cela, elle est tombée malade : elle fait tout le temps des cauchemars et doit voir une psychologue_;
… la situation est toujours très difficile pour sa famille restée au pays, qui lui manque beaucoup.
?
Ali (frère d'Aicha) … c'est la guerre dans son pays, l'Irak ;
… des gens venaient pour voler leurs maisons et les frapper avec des pistolets ;
… il est parti avec sa famille pour un long voyage à pied, en avion, en bateau… ;
… ils ont embarqué avec un tas d'autres personnes sur un bateau trop petit : il faisait très chaud et tout le monde poussait pour faire tomber des gens dans l'eau et gagner de la place ;
… lui-même s'est blessé en tombant par-dessus bord et a été repêché de justesse.
?
Fatima … en Érythrée, il y a des bombes partout_;
… son père a décidé que son épouse et les enfants devaient quitter le pays pour être en sécurité.
?
Zahra (sœur de Maryam) … il y a beaucoup de guerres en Afghanistan ;
… des voleurs leur ont pris leur argent et tout ce qu'ils avaient ;
… en voulant couper son bracelet pour lui prendre, un des voleurs lui a entaillé le bas : elle a reçu 52 points de suture ;
… sa mère a subi le même sort ;
… ils ont traversé la mer sur un petit bateau gonflable : elle pleurait beaucoup, comme tout le monde d'ailleurs… certains se sont noyés, emportés par la tempête ;
… la mer était grande et moche ; elle faisait très peur ;
… ils ont ensuite beaucoup marché sous la pluie ;
… une femme a accouché sur la plage et appelé sa fille Darya (mer) ;
… avant de quitter l'Afghanistan, elle a donné tous ses jouets à ses amis, sauf un petit nounours auquel elle tenait beaucoup et qu'elle a confié à son oncle, lui disant qu'un jour, elle viendrait le rechercher.
?
Mallak … en Irak, elle ne pouvait pas sortir de la maison, ni pour aller à l'école, ni pour aller jouer dehors car son père avait peur qu'elle ne soit enlevée ;
… son grand-père a été assassiné par Daesh ;
… Daesh n'aimait pas son père non plus ;
… sa famille a quitté le pays avant que Daesh ne pénètre en Irak.
?
Maryam (sœur de Zahra) … après ce qu'elle a vécu en Afghanistan, elle a tout enlevé de sa tête ;
… elle pleure quand une travailleuse rwandaise du centre parle de son expérience et de sa motivation à travailler dans un centre.
?

Commentaire

De manière générale, les enfants évoquent une vie heureuse et souvent confortable (grande maison, jardin, animaux de compagnie…) dans leur pays d'origine avant que les choses ne dégénèrent. La violence et la terreur (guerres, attentats, disparitions et assassinats, exactions diverses…) caractérisent chacun des récits, expliquant amplement le choix, à un moment donné, de quitter le pays pour chercher ailleurs un endroit où vivre en paix et en sécurité. De manière significative, plusieurs enfants identifient enfin la menace de leur propre enlèvement que des voleurs (d'argent, de bijoux, de maisons…) ont fait peser sur leurs parents comme étant l'événement déclencheur d'un départ précipité. Chacun de ces récits met ainsi bien l'accent sur l'endurance des familles, prêtes à se laisser dépouiller de leurs biens et à vivre dans la peur, pour autant qu'on ne touche pas à leurs enfants.

L'autre grand traumatisme évoqué par les enfants concerne les conditions du voyage entrepris pour gagner l'Europe, en particulier lorsqu'il s'est agi de traverser la mer. En effet, tous les témoignages se recoupent sur ce point, faisant état de canots pneumatiques surchargés et de nombreux accidents dus aux tempêtes, à la chaleur et une promiscuité intenables, au dégonflage des embarcations… à l'origine de bien des pertes humaines. C'est évidemment cette expérience effroyable, qui fait écho aux nombreux faits similaires rapportés par la presse, qui a donné son titre au film d'Idriss Gabel, Je n'aime plus la mer.

Prolongement

En guise de prolongement à l'activité, on pourrait demander aux élèves de se mettre à la place des enfants rencontrés dans le film en imaginant qu'arrive chez nous une situation analogue à celle qu'ils ont vécu. Ouvrons à cette fin une discussion en grand groupe autour des questions proposées ci-dessous. Au préalable, présentons les choses de la manière suivante :

Imaginez que vous deviez quitter précipitamment la Belgique avec votre famille - ou une partie seulement de votre de famille - parce qu'une guerre a éclaté et que vous vivez sous les bombes, ou que la Belgique est devenue un pays où l'on ne peut plus dire ce que l'on pense ni faire ce que l'on veut, où vous-mêmes et vos proches êtes menacés de mort et/ou subissez des vols, des violences physiques…

  • Dans quel pays penses-tu que tu pourrais te réfugier ? Pourquoi ?
  • Tu as très peu de temps et tu voudrais dire au revoir à tes proches
  • et à tes amis. Quelle est la personne que tu irais voir avant ton départ ?
  • Tu as l'autorisation d'emporter un petit sac à dos.
  • Que choisirais-tu de prendre avec toi ?
  • Tu vis avec un animal de compagnie et tu ne peux pas l'emmener. Que ferais-tu de lui ?


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