La belle et la meute colle aux basques de Mariam, jeune fille happée dans la nuit des institutions tunisiennes pour la reconnaissance d’un crime odieux – un viol. Un puissant plaidoyer, virtuose, fermement adressé à la domination masculine.
Mariam a de l’entrain et une jeunesse festive. Avec ses amies de la fac, elle organise une soirée dans une boîte de Tunis, même si elle sait qu’il faudra rentrer tôt à l’internat. En se maquillant dans les toilettes, les filles discutent tenues sexy et drague. Assez vite, Mariam repère un jeune homme qui l’attire, et l’intérêt semble réciproque. Une approche directe, et les deux décident d’aller faire un tour sur la plage qui jouxte la boîte.
Plan suivant, Mariam court à perdre haleine, le visage défait, les cheveux emmêlés, un sentiment d’effroi très nettement marqué sur ses traits. Le jeune homme, Youssef, court derrière elle et la rattrape.
Et lui, que nous croyions trop rapidement l’auteur de ce terrible méfait, se révèle ferme défenseur, mieux même, solidaire, au sens fort du terme, de Mariam. À la jeune fille violée, sidérée et hagarde qui veut « rentrer » et oublier tout ça, mais qui sursaute dès qu’elle entend une voiture passer, Youssef fait entendre l’importance d’acter le crime, de confronter les auteurs, de mener un parcours difficile, voire impossible, mais nécessaire, vers une éventuelle réparation.
Car il s’agit ici de cette noble idée de réparation qui s’oppose à celle de vengeance. Alors même que les institutions font défaut (secrétant en leur sein les odieux violeurs qui se croient, par leur fonction de représentant de la loi, au-dessus de celle-ci) Mariam et Youssef suivront les méandres de procédures absurdes, de regards suspicieux, de dénigrement, voire de menaces, dans le contexte d’une Tunisie post-révolution qui charrie son lot de problèmes.
La belle et la meute, s’il est un tableau à charge de la domination masculine, dénonce autant certains hommes que la déliquescence des institutions de droit. Dans ce marasme machiste et violent, la réalisatrice fait exister un magnifique personnage masculin comme contre-point porteur d’espoir, l’espoir qu’une jeunesse – homme comme femme – conscientisée et lasse des abus mette bas au patriarcat.