Lion d'or au festival de Venise 2017, Golden Globe du meilleur réalisateur
Cinéaste mexicain à l’univers atypique, Guillermo del Toro, revient avec cette romance hors norme entre une femme de ménage muette et un homme-poisson sur fond de Guerre froide.
Il est des films qui nous réconcilient avec notre âme d’enfant. Qui, dès les premières minutes, nous font écarquiller bien grand les yeux et nous emportent dans leur univers au-delà de toute vraisemblance. La forme de l’eau est de ceux-là, jonglant sans cesse entre fantastique, film noir et romance pour mieux nous subjuguer.
Nous sommes aux États-Unis au début des années 1960, au beau milieu de la Guerre froide. Dans des laboratoires ultrasecrets, les milices du gouvernement américain compulsent tout ce qu’ils ont sous la main pour avoir le dessus sur les Soviétiques.
Loin de cette ambiance fébrile et morose, nous rencontrons d’abord Elisa (époustouflante Sally Hawkins), une jeune femme muette et rêveuse. Son personnage prend racine entre le burlesque de Charlie Chaplin et la féérie d’Amélie Poulain. Quelque chose dans ses déplacements, sa manière d’agencer le réel, de rythmer ses habitudes quotidiennes lui donne ce petit côté marginal.
Elisa est femme de ménage et travaille de nuit dans un de ces labos secrets du gouvernement. Son job consiste à nettoyer sans poser de questions. Mais le jour où, par l’embrasure d’une porte blindée, elle observe l’agitation des militaires autour d’une étrange créature – qui ressemble drôlement à celle du lac noir – cela titille furieusement sa curiosité. Fascinée, Elisa tente de s’en approcher et entame petit à petit avec elle un dialogue fait de musiques et de repas à partager.
Cette valse platonique sera pourtant de courte durée : l’officier Strickland (Michael Shannon) veut disséquer la bête pour l’étudier tandis que les Russes désirent s’en emparer. Effrayée par les turbulences qui s’annoncent, Elisa, amoureuse, n’a d’autres choix que d’enlever la créature…
Véritable fable onirique, hommage au cinéma des studios hollywoodiens des années 1950 (film noir, musical), La forme de l’eau nous transporte dans son univers singulier où les outsiders sont héroïques, les méchants, démoniaques, et les amours, enchanteurs.
© Alicia Del Puppo, Les Grignoux