Une fable kafkaïenne à l’humour noir et féroce. L’un des plus grands pamphlets jamais réalisés contre la peine de mort.
Tourné avec un budget réduit, La pendaison adopte volontairement une structure théâtrale divisée en plusieurs actes. Lointainement inspirée par un fait divers, l’histoire y est celle de R, un Coréen coupable du viol et de l’assassinat de deux jeunes femmes. Condamné à mort, il survit à son exécution, mais en ressort amnésique. La loi n’autorisant pas la mise à mort de quelqu’un qui ne serait pas conscient de ses actes, les policiers, médecin, prêtre, juge qui assistent à l’exécution s’emploient alors à aider R à retrouver la mémoire… pour pouvoir le pendre à nouveau.
Derrière la fable qui tourne en ridicule tout un système policier et juridique, on a pu évoquer Brecht par la distanciation grinçante du propos. Dans un bel article, Stéphane du Mesnildot a raison d’également citer Buñuel pour le grotesque de ces saynètes mais aussi pour le glissement progressif vers la matérialisation des rêves de R qui prennent corps et éloignent le film de son didactisme initial. Au fur et à mesure de son déroulement, La pendaison nous entraîne dans un univers de plus en plus absurde et poétique où la femme, comme souvent chez Oshima, joue un double rôle révélateur de sœur et d’amante (comme dans La cérémonie). La pendaison est par ailleurs le premier film d’Oshima à avoir bénéficié d’une distribution à l’étranger, révélant son nom et son travail en Europe.
(Alain Hertay, Culturepoing)