Haifaa Al-Mansour (la réalisatrice saoudienne de Wadjda) revient avec un biopic sur Mary Shelley, pivotant autour de cette fameuse nuit durant laquelle fut écrit "Frankenstein"…
Mary Shelley n’a que 18 ans lorsqu’elle s’impose dans le monde littéraire du XIXe siècle, à une époque où les femmes étaient condamnées à la poésie ampoulée ou à la littérature romanesque forcément courtoise… Son chef-d’œuvre, "Frankenstein", naît en une nuit fiévreuse, porté par le défi que quelques jeunes gens se lancent : écrire chacun une histoire d’épouvante. Mais au-delà de la genèse de "Frankenstein", Haifaa Al-Mansour raconte aussi le douloureux éveil à l’amour de la jeune écrivaine.
En 1814, Mary Wollstonecraft Godwin, 16 ans, rencontre le fascinant poète Percy Shelley, apprenti chez son père écrivain devenu libraire. C’est le coup de foudre immédiat et, contrairement à toute convenance, Mary s’enfuit avec le jeune homme dont elle découvre qu’il est toujours marié et père d’une jeune enfant… Qu’à cela ne tienne, même ce vilain secret révélé ne la décourage pas. C’est le scandale absolu, le désaveu total par son père pourtant aimant. Après la période d’euphorie d’une existence bohème mais confortable, c’est l’heure des désillusions. Lors d’un séjour à Genève chez Lord Byron, justement là où germa "Frankenstein", Mary se rend compte que son prince charmant peut être un redoutable pervers narcissique.
Le film, classique mais extrêmement bien mené et mis en scène avec classe, ne serait pas aussi fort sans l’interprétation remarquable d’Elle Fanning. Au début du film, Mary a 16 ans, elle est confite d’innocence romantique, à la fin elle a une vingtaine d’années et est marquée par la gravité du destin et l’âpreté du combat mené pour s’imposer. Elle Fanning décline merveilleusement toutes les facettes du personnage, du bonheur au drame. Mary Shelley confirme ainsi en beauté le talent multiforme d’une jeune actrice en même temps que le brio d’une réalisatrice capable d’investir des univers très différents.
LA GAZETTE UTOPIA