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Lion d'Or à la Mostra de Venise 2021,
Meilleur film et Meilleure actrice aux Lumières 2022,
Meilleur Espoir Féminin pour Anamaria Vartolomei aux Césars 2022
Adaptant le roman d’Annie Ernaux, Audrey Diwan saisit avec une puissance phénoménale l’expérience d’une grossesse non désirée à une époque où l’avortement était encore illégal. Plaidoyer vibrant pour le droit à disposer de son corps, L’Événement ne peut laisser personne indifférent ! Lion d’Or à la Mostra de Venise 2021
Nous sommes en 1963. Anne débute ses études en lettres et elle se distingue déjà des autres étudiants par ses connaissances et son ambition. La place des femmes dans les amphithéâtres universitaires commence tout juste à se normaliser, et encore : elles sont nombreuses à abandonner en cours de route, peu encouragées à poursuivre ce type de parcours. Venant d’un milieu modeste, Anne a d’autant plus de volonté de réussir. L’enjeu, pour elle, est primordial.
Mais, très vite, elle apprend qu’elle est enceinte de quelques semaines.
À partir de cet instant, un compte à rebours s’enclenche et le récit s’intensifie. Cette nouvelle est une véritable menace pour son futur, pour son indépendance. Anne ne peut en aucun cas concevoir cette grossesse, ni la conscientiser. Celle-ci ne peut tout simplement pas exister. Elle supplie son médecin de l’aider, mais il esquive la conversation. L’avortement est illégal, il ne peut transgresser la loi.
Commence alors pour Anne une course contre la montre pour empêcher l’évolution de cet embryon. Mais comment faire ? À qui se confier ?
La bienséance de l’époque voudrait que les femmes n’aient pas de rapports sexuels avant le mariage et juge férocement celles qui enfreignent cette règle implicite. Même auprès de ses amies, le sujet est tabou…
Anne est seule. Seule face à une société qui condamne l’avortement, seule face à une morale qui désapprouve ses désirs et sa liberté, et même seule face à son corps qui cesse de lui appartenir, s’engageant malgré elle dans une voie que tout son être refuse. Mais, comme toutes les femmes avant elle qui ont cherché à avorter clandestinement en connaissance des risques encourus, Anne est déterminée…
Audrey Diwan signe un film implacable, parvenant à rendre sensible et palpable la tension vitale qui agite la protagoniste principale. La caméra la suit, pas après pas, dans sa quête effrénée de délivrance. S’il y a un personnage auquel on pense en la regardant se démener, c’est bien à la Rosetta des frères Dardenne.Anne a comme elle cette ardente conviction, cette acuité dans le regard que rien ne pourra arrêter, cette volonté ferme de ne pas compromettre sa réussite scolaire, et par là même son ascension sociale.
Pourtant elle suffoque, et nous suffoquons avec elle. Parce que le temps file et que ses règles ne reviennent pas. Son visage transpire d’inquiétude, mais de larmes, Anne n’en versera pas. Ses larmes – comme les nôtres – sont ailleurs, coincées entre la colère et l’injustice de cette situation (la loi Veil qui dépénalise l’IVG n’arrivera que douze ans plus tard, en 1975).
L’émotion que le film charrie n’a rien de facile. C’est une émotion chargée d’histoire, de luttes et d’émancipation, qui nous fait regarder ce passé avec l’urgence du présent et des acquis sociaux qu’on détricote aux quatre coins du globe (y compris en Europe). C’est une émotion qui vient des tripes – là où s’insinue l’objet même du récit – et qui nous relie immanquablement à la condition féminine.
Pour tout cela, L’Événement est un grand film !
ALICIA DEL PUPPO, les Grignoux
