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Inscrit dans la mouvance du nouveau cinéma français qui bouscule les codes et les genres pour offrir des récits hybrides et contemporains, Les Cinq Diables est une des belles surprises du Festival de Cannes. Un drame à la frontière entre réalisme et fantastique qui intrigue de bout en bout !
Vicky, petite fille étrange et solitaire, a un don : elle peut sentir et reproduire toutes les odeurs de son choix qu’elle collectionne dans des bocaux étiquetés avec soin. Elle a extrait en secret l’odeur de sa mère, Joanne, à qui elle voue un amour fou et exclusif, presque maladif. Un jour, Julia, la sœur de son père, fait irruption dans leur vie. Vicky se lance dans l’élaboration de son odeur. Elle est alors transportée dans des souvenirs obscurs et magiques où elle découvrira les secrets de son village, de sa famille et de sa propre existence.
Le synopsis en lui-même est déjà intrigant. L’accent est mis sur l’aptitude de Vicky à reconnaître et répertorier l’intégralité du monde olfactif qui l’entoure, et la conséquence étonnante que celle-ci a de la téléporter dans un monde parallèle. L’odeur de Julia conduit Vicky dans le passé de celle-ci, étrangement mêlé à celui de sa mère et de son père. Un don qui duplique donc les temporalités, lui permettant de circuler à différentes époques avec tout ce qu’il peut y avoir d’effrayant à cela…
Toute la puissance du script de Léa Mysius vient du fait que ce motif surnaturel n’est jamais utilisé pour intensifier l’aspect fantastique du récit, mais pour creuser davantage dans l’histoire intime qui lie les personnages entre eux. Une histoire complexe, nouée par un drame originel qui a bousculé leur destinée. Un drame qui acquiert presqu’une dimension mythologique avec cette idée du destin auquel on ne peut échapper. Pourtant, l’intrigue se déroule dans un petit village de montagne français qui n’a, a priori – si ce n’est ses paysages –, rien d’extraordinaire.
L’originalité des Cinq Diables se traduit aussi dans la vision du monde, et en particulier de la France, qu’il véhicule. Cette famille française provinciale est une famille métissée, dont le métissage n’est pas le sujet du film (bien qu’elle n’échappe pas au racisme latent de son entourage). Et cet aspect est assez rare pour être souligné.
Léa Mysius fait partie de cette nouvelle génération de cinéastes français·es qui naviguent entre les genres – à différents niveaux de lecture – et dont la fluidité fait toute la richesse du scénario. On pense évidemment à Julia Ducournau et son dézinguant Titane. Et on se dit que c’est peut-être par cette voie-là que le cinéma français se renouvellera !
ALICIA DEL PUPPO, les Grignoux
