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Extrait du dossier pédagogique
réalisé par les Grignoux et consacré au film
Bashu, le petit étranger
de Bahram Beyzaie
Iran, 1986, 2h00

Le dossier pédagogique dont on trouvera un extrait ci-dessous s'adresse aux enseignants qui verront le film Bashu, le petit étranger avec leurs élèves (entre dix et treize ans ans environ). Ce dossier, contrairement à d'autres plus récents réalisés par les Grignoux, ne contient pas de pistes d'animation immédiatement utilisables en classe : il s'agit essentiellement d'un travail original d'analyse du film et de vulgarisation sur quelques grands thèmes (l'Iran d'un point de vue historique, politique et social, la guerre Iran-Irak de 1980 à 1988). On tiendra compte de la date de publication (1992) relativement ancienne de ce dossier.

Bashu, le petit étranger : approche du film

A. Le projet du réalisateur

Bashu, le petit étranger est un film iranien, qui a été réalisé par Bahram Beyzaie en 1986.

Bahram Beyzaie est, à nos yeux, un réalisateur très peu connu. Pourtant en Iran, il s'agit de l'un des cinéastes les plus célèbres et les plus respectés. Il est né en 1938 à Téhéran (la ville capitale de l'Iran) et depuis 1970, il a déjà réalisé une bonne dizaine de films. Il se consacre aussi beaucoup au théâtre : ses pièces sont régulièrement jouées et montrées au public iranien.

En ce qui concerne Bashu, c'est lui-même qui en a écrit le scénario, qui a tourné et monté le film, en se basant sur une histoire inventée pour Sussan Taslimi, l'actrice qui incarne le personnage de Naïe. Le film a été produit par l'Institut pour le Développement Intellectuel des Enfants et des Jeunes Adultes. Il s'agit d'un organisme très important qui, entre autres, sélectionne les films et contrôle leur contenu avant d'en autoriser la sortie en salle.

Les rôles principaux sont tenus par Sussan Taslimi (qui joue le personnage de Naïe, la paysanne qui va adopter Bashu), Adnan Afravian (qui tient le rôle de Bashu) et Parviz Pourhosseini (le mari de Naïe).

Voici comment il définit son projet cinématographique.

«L'idée de Bashu m'est venue de son actrice principale, Sussan Taslimi; je lui ai demandé d'en faire une nouvelle à partir de laquelle j'ai pu écrire le scénario du film. Très rapidement, nous avons commencé à tourner dans le nord de l'Iran. Un de mes problèmes essentiels a été de trouver un enfant capable d'interpréter Bashu. Nous avons d'abord cherché chez les réfugiés du sud dans l'espoir de trouver un jeune garçon qui aurait vécu une expérience proche de celle vécue par notre héros. Sans résultat. Et c'est tout à fait par hasard, dans un voyage dans le sud, que nous avons découvert Adnan. Nous avons été tout de suite séduits car il était très caractéristique des gens de cette région. Les difficultés qu'il a à parler le farsi [la langue du nord] sont les siennes dans la vie. Bashu traite des gens qui n'ont pas souhaité la guerre mais sont obligés d'en assumer les conséquences. Le film parle de l'émigration intérieure et de ses conséquences souvent néfastes. Le film traite également de l'émergence de nouvelles formes de vie collective telles que la formation de la famille qui ne soit plus basée uniquement sur les liens du sang....Il n'y a pas de «mauvais» dans Bashu. Les paysans ne sont pas méchants envers Bashu mais plutôt pleins de compassion pour la difficile situation dans laquelle se trouve Naïe. Dans la plupart de mes films "L'homme qui ne sait rien" se voit confronté à "l'homme qui en sait trop". Mon sentiment est que celui qui ne sait rien peut apprendre et changer, ce qui n'est pas le cas de l'autre. Bien entendu, dans les deux cas les hommes peuvent changer… ou pas. C'est ce thème que j'ai essayé de développer dans Bashu comme dans mes autres films. C'est un thème commun à notre société dont je suis persuadé qu'il possède une universalité indéniable».

B. Où se situe l'action du film ?

Avant de s'embarquer clandestinement dans un camion pour fuir les bombardements, Bashu vit dans une région apparemment désertique (ou semi-désertique) et délabrée par la guerre. Nous devinons sans peine que l'action se passe à proximité de la frontière Iran-Irak, là où, durant huit années, les combats ont effectivement fait rage.

D'autres détails visibles dans le film (les quelques palmiers du début, la scène où Bashu, déjà installé dans le nord depuis un certain temps, se revoit marcher sur la plage en compagnie de ses parents) nous permettent de localiser le village avec plus de précision encore : celui-ci, proche de la frontière irakienne, se situe par ailleurs non loin de la mer, donc quelque part sur le golfe persique, dans le sud-ouest; il s'agit de la région d'Abadan, une ville portuaire qui abrite l'une des installations pétrolières les plus importantes du pays. Cette région s'appelle le Khouzistan : elle est peuplée essentiellement d'Arabes, ce qui explique que Bashu ait une peau plus sombre que les Iraniens du nord, eux-même d'origine indo-européenne. Ceci explique aussi que Bashu parle un dialecte très proche de l'arabe, qui ne correspond en rien au farsi[1] classique, la langue nationale de l'Iran, que parle Naïe.

Une fois plongé dans l'obscurité du camion, Bashu n'aura pas l'occasion d'observer l'immense territoire qu'il va traverser ni de s'adapter aux métamorphoses du climat, du relief, de la végétation…

Il se retrouvera brutalement dans une région calme, paisible et verdoyante, à l'économie surtout agricole. Le poisson séché que Naïe vend sur le marché est un autre indice du film qui nous permet de situer l'endroit où Bashu échoue non loin des côtes de la mer Caspienne.

C. Une intégration difficile

Le contraste est fort et frappant pour le petit orphelin doublement marqué par la guerre et par toutes ces différences géographiques et culturelles. Il lui faudra vaincre de nombreux obstacles : la langue, qu'il ne connaît pas et qu'il va devoir apprendre, son traumatisme qui, au départ, bloque toute possibilité de contacts «normaux» avec la population , son jeune âge, qui ne lui permet pas de s'imposer ni de s'exprimer, la disparition subite et prématurée de ses parents, qui apparaissent régulièrement comme des fantômes… De surcroît, plus sombre de peau que les villageois, il provoque l'inquiétude et suscite la méfiance. Les premiers contacts qu'il aura avec Naïe seront difficiles : imprégnés de peur, de méfiance (Bashu) et d'incompréhension (la paysanne), ils se traduiront par des comportements hostiles et de rejet.

Face à la réaction apeurée de Bashu lorsqu'elle lui présente de la nourriture, devant son mutisme et sa fuite, Naïe finira par le repousser. Et lorsqu'il accepte enfin le repas qu'elle lui tend, Bashu va faire d'emblée l'expérience de la différence en découvrant que les aliments — leur aspect, leur goût — lui sont totalement étrangers : dans un premier temps, il refusera donc de se nourrir. Au fur et à mesure qu'il découvre sa terre d'accueil, Bashu sera confronté à diverses attitudes racistes : il doit notamment appréhender l'hostilité du voisinage, qui refuse de l'intégrer à la moindre vie sociale.

Ces comportements hostiles, il n'y aura pas que Bashu qui devra les subir : Naïe elle-même aura à supporter les réactions agressives de ses voisins et parents, qui tous lui recommandent de laisser tomber le jeune orphelin. Devant la persévérance de la jeune femme, ses proches décideront finalement de confiner toute la famille dans un isolement total. Seule pour élever ses deux enfants et Bashu, elle verra disparaître au fur et à mesure ses principales sources de revenus. Malgré tous ces obstacles à surmonter, elle décide de garder et d'élever celui qu'elle considère comme son nouvel enfant. Sa plus grande réussite sera sans doute de le faire accepter par son mari. A partir de là, on peut imaginer une reconnaissance totale de la part des villageois.

À noter la scène qui exhibe la première rencontre entre Bashu et le mari de Naïe. L'image montre clairement des rapports inversés.

Bashu, maintenant parfaitement intégré à l'univers rural, y exerce des tâches précises : quelque part, il remplace d'ores et déjà le père absent et gère un certain nombre de travaux. Lorsque l'époux survient, seul, sans bagages, et qu'il s'adresse à Bashu, qu'il devine être le «nouvel arrivé» dans la famille, c'est lui qui apparaît manifestement comme l' «étranger».

D. Religions et rites païens

[...]

E. Le monde intérieur de Bashu

[...]

F. Le regard d'un enfant

[...]


1. Bashu et les enfants du village parlent des langues différentes. Ils n'ont par conséquent pas l'impression de faire partie du même pays,de la même culture:personne ne sait d'où vient Bashu. Lui-même ignore totalement où il se trouve.
À un moment donné, Bashu ramasse un livre d'école et se met à lire, à la grande surprise de tous : le farsi, la seule langue enseignée dans les écoles, rapprochera enfin «le petit étranger» de ses camarades, qui ont enfin compris que lui aussi est iranien.


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