Medias
Journal & grilles Appli mobile Newsletters Galeries photos
Medias
Journal des Grignoux en PDF + archives Chargez notre appli mobile S’inscrire à nos newsletters Nos galeries photos
Fermer la page

Extrait du dossier pédagogique
réalisé par les Grignoux et consacré au film
Vincent et moi
de Michael Rubbo
Canada, 1991, 1h35

Les activités proposées dans ce dossier consacré au film de Michael Rubbo Vincent et moi s'adressent d'abord aux enseignants du primaire ou du début du secondaire qui verront ce film avec leurs élèves entre dix et treize ans environ. Elles pourront également intéresser les animateurs en éducation permanente qui, dans le cadre notamment d'un dialogue intergénérationnel, souhaitent initier un large public, jeune ou moins jeune, à l'univers de la peinture et, en particulier, à celle de Van Gogh. Elles auront pour objectifs principaux de faire découvrir aux participants cette oeuvre célèbre, de les sensibiliser aux questions de valeur en matière d'art (les facteurs susceptibles d'influencer la fluctuation des prix, la copie comme pratique assumée ou frauduleuse…) et enfin, de les amener à comprendre les moyens qu'a utilisés Michael Rubbo pour réaliser un film qui rappelle lui-même l'univers et l'oeuvre du peintre.

L'extrait proposé ci-dessous s'intéresse plus précisément au thème de la copie en art.

LE THÈME DE LA COPIE

Au-delà de la peinture de Van Gogh et de l'enquête que mène Jo pour retrouver son dessin, le thème de la copie traverse également tout le film. C'est sur cet aspect de Vincent et moi que nous souhaitons maintenant revenir avec les spectateurs, avec l'objectif de bien distinguer les différents registres de motivation qui peuvent pousser un artiste à en copier un autre ainsi que l'écart fondamental qu'il y a entre une copie assumée et une copie frauduleuse.

PRATIQUEMENT

Pour aborder cet aspect, commençons par demander aux élèves s'ils se rappellent de moments du film où il est question de copie. Sans doute n'éprouveront-ils aucune difficulté à se souvenir du panneau qui doit servir de fond au décor du spectacle mis en scène par Félix à l'école et pour lequel Jo a copié une toile de Henri Rousseau (dit « le Douanier »), et d'autre part du tableau de Van Gogh volé au musée et qu'elle retrouve au fond d'une cale, à côté d'une copie qu'un jeune homme a bien du mal à terminer.

À ces deux situations exposées dans le film, ajoutons-en une troisième — l'oeuvre du peintre Jean-François Millet, fréquemment copiée par Vincent Van Gogh lui-même — et faisons circuler un jeu d'images (série B, page 2) dans la perspective d'amorcer en grand groupe une comparaison des trois démarches : celle de Jo, celle de Van Gogh et celle du jeune faussaire vu dans le film. Une telle comparaison devrait permettre en effet de dégager une distinction importante entre une copie assumée, qui est autorisée, et une copie frauduleuse qui, par définition, ne l'est pas.

Le rôle de l'enseignant ou de l'animateur consistera ici à orienter la réflexion en suggérant l'une ou l'autre question :

  • Qu'est-ce que ces trois démarches ont en commun mais aussi de différent ?
  • Quelle est la motivation de Jo ? pourquoi copie-t-elle le Douanier Rousseau ?
  • Que lui a demandé son professeur ? à quoi sa toile doit-elle servir ?
  • Quelle est la motivation du jeune homme rencontré dans la cale du bateau ? pourquoi copie-t-il un tableau de Van Gogh ?
  • Qui lui a demandé de faire cette copie ? à quoi sa toile va-t-elle servir ?
  • Et Van Gogh, peut-on imaginer ce qu'il a voulu faire en copiant l'oeuvre de Millet ?
  • Quelles sont les différences qu'on remarque entre les copies et les originaux ? Quelle est la copie qui ressemble le plus à l'original ? Et celle qui y ressemble le moins ?

COMMENTAIRE

Jo : un manque d'imagination

En copiant le tableau du Douanier Rousseau, Jo n'a qu'une envie : satisfaire son professeur, qui lui a demandé de peindre une forêt tropicale. Comme elle n'a pas d'imagination, elle se laisse convaincre par Félix de reproduire une oeuvre trouvée dans un livre et qu'elle imagine totalement inconnue. Ce sentiment la conforte dans son obstination à mentir, jusqu'au moment où le professeur lui montre une reproduction du tableau original en lui présentant comme l'oeuvre d'un peintre renommé.

Confuse, Jo est alors obligée de reconnaître qu'elle a effectivement copié la toile intitulée Le Rêve, de Henri Rousseau. Son objectif n'était cependant pas d'en produire une copie fidèle puisqu'elle a remplacé le nu féminin du tableau par un portrait de Félix allongé dans une position identique à celle du modèle original. Bien que refusé au départ à cause de ce mensonge, le projet de Jo sera finalement adopté grâce au soutien des autres élèves, incapables de produire quelque chose de mieux. Assumée comme telle, la copie de Jo aura donc toute sa place dans le spectacle.

Le faussaire : l'appât du gain

Les intentions du malfrat qui profite du talent du jeune inconnu découvert dans la cale d'un bateau pour produire une copie parfaite de Joseph Étienne Roulin, un tableau de Van Gogh dérobé au musée, sont toute différentes. Contrairement à Jo, tout ce que cet escroc vise, ce sont les sommes colossales que certains amateurs sont prêts à débourser pour acquérir ce qu'ils pensent être un Van Gogh authentique. Pour leurrer l'éventuel amateur, il est par conséquent très important de reproduire scrupuleusement les moindres détails du tableau original, comme essaie de le faire le jeune inconnu qui travaille au portrait de Joseph Étienne Roulin. Dans ce cas-ci, il s'agit bien d'une copie frauduleuse puisque ce marchand d'art ne compte évidemment pas révéler la supercherie grâce à laquelle il va faire fortune. Les enjeux et ses motivations sont donc totalement différents, et l'on ne parle plus de copie mais bien de faux.

Van Gogh : un travail d'interprétation

Quant aux tableaux de Millet copiés par Van Gogh, ils ne sont absolument pas le fruit d'une intention frauduleuse. En effet, ce dernier n'a jamais tenté de faire croire que ses propres tableaux étaient ceux de Millet et malgré l'imitation de ses motifs, leurs oeuvres sont profondément différentes. Ainsi par exemple les couleurs vives, absentes des tableaux de Millet, leur apportent une dimension totalement nouvelle, qui traduit le regard propre de Van Gogh sur les motifs qu'il choisit de copier.

Ses motivations sont donc encore différentes de celles de Jo (qui copie par manque d'imagination en faisant croire que le résultat est une oeuvre personnelle) ou du jeune homme exploité par un escroc (qui copie pour de l'argent en faisant croire que le résultat est l'oeuvre d'un autre peintre beaucoup plus renommé). En apportant sa touche personnelle, Van Gogh estime accomplir un travail d'interprète, comme il le confie à son frère Théo dans l'une de ses lettres : « Plus je réfléchis, plus je trouve que cela ait sa raison d'être de chercher à reproduire des choses de Millet, que celui-ci n'a pas eu le temps de peindre à l'huile [1]. Alors travaillant soit sur ses dessins, soit sur les gravures sur bois, c'est pas copier pur et simple que l'on ferait. C'est plutôt traduire dans une autre langue — celle des couleurs — les impressions de clair-obscur en blanc et noir. »


1. Van Gogh connaissait « La Méridienne » de Millet à travers une gravure (en noir et blanc) d'Adrien Lavieille.

 

Vous pouvez également consulter sur ce site une version ancienne d'un dossier pédagogique consacré à Vincent et moi. Ce document est disponible au format PDF en suivant ce lien


Tous les dossiers - Choisir un autre dossier