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Extrait du dossier pédagogique
réalisé par les Grignoux et consacré au film
Mobile Home
de François Pirot
Belgique/France, 2012, 1h35

Le dossier pédagogique dont on trouvera un extrait ci-dessous s'adresse notamment aux enseignants du secondaire qui verront le film Mobile Home avec de jeunes spectateurs à partir de quatorze ans environ. Il retiendra également l'attention des animateurs en éducation permanente qui souhaitent mener une réflexion autour de ce film avec un large public intéressé par ses différents thèmes, notamment notamment la question des aspirations de la jeunesse et du passage — plus ou moins difficile — à l'âge adulte.
Le dossier comprend plusieurs parties qui correspondent à autant de pistes d'exploitation possibles : en fonction de ses intérêts et de ceux du public auquel il s'adresse, l'enseignant ou l'animateur retiendra sans doute l'une ou l'autre de ces pistes, même s'il est tout à fait possible de parcourir l'ensemble des animations proposées. Celle proposée ci-dessous porte sur l'aspect de comédie de ce road movie très particulier…

Les ressorts comiques du film

Objectif visé et compétences mises en œuvre (cours de français)

L'objectif de cette animation est d'amener les participants à exprimer leur avis à propos de la tonalité humoristique du film et à identifier les procédés comiques utilisés par son réalisateur.

L'activité devrait par ailleurs permettre l'exercice de compétences comme:

  • La participation à une situation de communication: la réunion d'échanges.
  • L'identification dans le texte (ici, le film) des éléments constitutifs du type comique.
  • Le repérage d'indices corporels: l'occupation de l'espace, la posture, les gestes, les mimiques, les regards…
  • L'interprétation de ces indices visuels en fonction du contexte (environnement, détails de mise en scène cinématographique: cadrage, montage…)

L'humour représente la tonalité dominante de Mobile Home. Bien des situations comiques ponctuent ainsi le film, que celles-ci relèvent de l'attitude des personnages (gestes, mimiques, comportements, réactions…) ou d'un effet purement cinématographique. C'est cette dimension que nous souhaitons maintenant exploiter avec les participants, en les invitant à relever ce qui les a fait rire dans le film et à identifier les raisons pour lesquelles ils ont trouvé ces moments-là particulièrement drôles.

Méthode

1. L'activité pourra débuter en grand groupe par l'établissement collectif d'une liste des situations comiques dont les participants se souviennent. Une alternative individuelle est également possible, chacun étant amené dans ce cas à passer en revue un ensemble de moments que nous avons nous-mêmes inventoriés (voir encadré n°8) et à indiquer à l'aide d'un signe distinctif ceux auxquels ils ont été plus particulièrement sensibles. L'avantage sera ici pour le groupe de remarquer rapidement que les mêmes situations ne font pas rire tout le monde de la même façon et qu'il n'y a donc pas de critère universel qui permette de les classer définitivement dans un registre ou dans un autre.

2. Une deuxième étape verra les participants se répartir en petits groupes afin de réfléchir, à partir des situations sélectionnées, aux procédés qui ont permis de déclencher le rire. Dans cette perspective, on les invitera à se souvenir:

  • des mimiques des personnages, de leurs gestes et/ou postures;
  • de leurs réactions et de leurs comportements;
  • du contexte dans lequel s'inscrivent les situations relevées;
  • des détails de la mise en scène imaginée par François Pirot (positions et mouvements de caméra, cadrages, montage…).

3. Un partage des résultats en grand groupe sera enfin l'occasion de dégager les spécificités du film de François Pirot en matière d'humour: quels sont les procédés qu'il privilégiepour faire rire le spectateur? En quoi Mobile Home se différencie-t-il d'autres films à dimension comique, comme les films d'Alain Chabat — Astérix et Cléopâtre (2002), RRRrrrr!!! (2004), Sur la piste du Marsupilami (2012)… —, qui fait souvent appel à des acteurs très typés comme Jamel Debbouzepar exemple? Etc.

Quelques situations comiques?
Parmi les situations suivantes, lesquelles as-tu trouvées comiques? Pour chacune d'entre elles, note ton sentiment à l'aide des échelles d'évaluation. À la fin de l'exercice, entoure celles qui t'ont fait le plus rire. Très comique Assez comique Légèrement comique Pas du tout comique
a. La mère de Simon entreprend de faire l'ourlet de son pantalon à 5 heures du matin.



b. Déguisé en Indien, Julien parle à une marionnette qu'il a retrouvée dans la grange.



c. Simon demande à ses parents leur accord pour utiliser la somme d'argent qu'ils ont épargnée pour lui afin de démarrer une vie d'errance au jour le jour.



D. Par le plus grand des hasards, les parents de Simon dépassent le mobile home qu'il a acheté avec l'argent qu'ils ont économisé pendant toute leur vie.



e. Au volant du mobile home en marche, Simon boit une canette de bière; il s'affale ensuite sur la banquette arrière, à côté de Julien.



f. Simon se bat avec les sapins qu'il essaye de déraciner.



g. Au petit matin, Julien ouvre la porte du mobile home, qui descend lentement du ciel.



h. Alors qu'ils prennent le dîner ensemble, Luc explique à son fils qu'il a reçu les résultats de son check up.



i. Pendant que Simon joue un morceau à la guitare pour Maya, Julien cherche des métaux avec son détecteur.



j. Arrivé à l'improviste chez son père, Julien le trouve en haut d'une échelle.



k. Excédé que Sylvie ait fait débarquer toutes ses affaires devant la maison de ses parents, Simon décide de tout embarquer dans le mobile home.



l. Enfin prêt à partir, Simon vient dire au revoir à ses parents.



Commentaires

Un comique de situation (a, b, d, j, l)

Certaines situations du film tirent leurs effets comiques de leur caractère incongru ou tout simplement inattendu. Qu'il s'agisse de coudre l'ourlet d'un pantalon, de jouer aux marionnettes, de dépasser un mobile home sur la route ou encore de grimper en haut d'une échelle, aucune de ces situations en elles-mêmes ne prête à rire. Par contre, leur insertion dans un contexte précis peut bel et bien se trouver à la source d'effets comiques plus ou moins appuyés. Dans la première situation (a), ce qui rend la scène plutôt drôle, c'est que la mère de Simon entreprend l'ouvrage à l'aube, alors que son fils vient de rentrer de sortie et qu'elle-même l'a attendu toute la nuit sans trouver le sommeil. Alors qu'il envisageait de se mettre au lit au plus vite, Simon se retrouve donc debout sur la table de la cuisine à attendre patiemment que sa mère ait terminé de prendre les mesures.

Dans la deuxième situation (b), si le spectacle de Julien déguisé en Indien et occupé à parler avec sa marionnette peut prêter à sourire vu l'âge du jeune homme, cette conduite prend une dimension franchement drôle lorsque Simon débarque dans la grange et que, décontenancé par cette arrivée impromptue, Julien jette discrètement la poupée dans un coin de la pièce, tout en étant bien obligé d'assumer son accoutrement devant son ami.

Alors que Julien et Simon viennent tout juste de prendre le départ, leur mobile home se fait dépasser par la voiture des parents de Simon (d) qui ignorent tout, à la fois de l'achat du véhicule et du départ précipité de leur fils. Ils le reconnaissent cependant au volant et s'arrêtent une centaine de mètres plus loin, faisant de grands gestes au bord de la route quand le mobile home arrive à leur hauteur. Mais Simon ne s'arrête pas et continue de filer, vautré sur le volant et bien décidé à rester caché en dépit du fait qu'il a déjà été découvert. Cette réaction de panique insensée, qui reflète bien la personnalité fragile et inconséquente de Simon, prête évidemment à rire d'autant plus qu'il persiste à vouloir les semer en s'enfonçant sur les chemins de terre. Cette course-poursuite qui se termine en eau de boudin par une confrontation hallucinante entre poursuivants et poursuivis prend ainsi toutes les proportions d'un vrai gag.

Dans l'avant-dernière situation, le fait que Julien trouve son père âgé et malade au sommet d'une échelle (j) n'a rien d'hilarant, bien au contraire. Si nous partageons l'angoisse du jeune homme jusqu'au moment où Luc retrouve le sol, nous évacuons par le rire toute la tension accumulée lorsque Julien hurle soudainement «Mais qu'est-ce qui t'a pris?!» en direction du vieillard, calme et toujours égal à lui-même. Avec cette sorte de renversement des rôles, c'est une fois encore le contexte général de la scène qui prédomine dans la production d'effets comiques, là où l'on aurait attendu une tonalité plus dramatique.

Enfin, après avoir déposé Julien chez son père, Simon retourne chez ses parents (l). Après avoir reconduit celui qui devait être son compagnon de fortune, le spectateur a tout lieu de supposer qu'il revient lui aussi définitivement au bercail. Or, de manière tout à fait inattendue, Simon est simplement venu dire au revoir à ses parents, qu'il a pourtant eu maintes fois l'occasion de saluer. Ainsi, après le «faux départ» de leur fils, c'est donc maintenant son «faux retour» qui les laisse sans voix. Cette situation, qui tarde à être révélée, prend dès lors des accents de gravité qui figent les traits de ses parents et tranchent avec la banalité de l'annonce qu'il a à leur faire: il est venu dire au revoir.

Gestes, attitudes, mimiques (c, h, l)

Simon choisit le moment du repas familial pour demander à ses parents leur accord pour utiliser l'argent qu'ils ont économisé pour lui (c). La disposition des personnages autour de la table est ici révélatrice de l'effet recherché par le réalisateur, qui choisit de filmer la scène en plaçant face à face Simon d'un côté de la table et ses parents de l'autre, alternativement montrés de manière frontale et en gros plan (le visage de Simon) ou en buste (les deux parents étant réunis dans un même plan). Cette manière de filmer permet donc de mettre en relief les mimiques, attitudes et petits gestes des protagonistes de la scène, en particulier du père et de la mère, dont on perce ainsi aisément les émotions intérieures et mouvements d'humeur sans qu'ils aient besoin de s'exprimer bien longuement par la parole. Leur ahurissement, mêlé d'amusement puis de contrariété et de consternation face à la nouvelle que leur annonce leur fils a pour effet d'accroître la dimension presque surréaliste de son tout nouveau projet.

Une même disposition de part et d'autre d'une table caractérise le cadre de la conversation qu'entretiennent Julien et son père autour des résultats du check up de Luc (h). Contrairement à la situation précédente, la scène est cette fois filmée d'un point de vue latéral, les deux personnages étant englobés dans un même plan. La manière dont Luc doute des bons résultats qu'il a obtenus — par des sous-entendus («à ce qui y paraît…») mais aussi de petits gestes de la main que, dans ces circonstances, le spectateur interprète immédiatement comme des signes de fatalisme, de résignation face à un diagnostic perçu comme un diagnostic de complaisance — ainsi que la mine atterrée de Julien face à une réaction qui n'a pas lieu d'être apportent à la scène une dimension comique qu'elle n'aurait sans doute pas sans cette attention portée aux petits gestes et mimiques de ses protagonistes.

Enfin, de la même manière, c'est le geste du père de Simon qui déclenche le rire lorsque ce dernier revient une nouvelle (et dernière) fois chez ses parents pour leur dire au revoir (l). Cet Xième retour inattendu à la case départ met en effet leurs nerfs à rude épreuve et en particulier ceux de sa mère, qui redoute de vivre une fois de plus une scène d'explosion pareille à celle qu'elle avait dû subir quand son fils était venu récupérer ses affaires déposées sur le trottoir par le père de Sylvie. Craignant une réaction émotive trop violente chez son épouse, le père de Simon a alors à son égard un geste discret des deux mains signifiant «calme-toi; on le connaît. Lâchons prise, on ne peut de toute façon rien n'y faire…».

Réactions, comportements (d, f, k)

La réaction de Simon quand il aperçoit dans son rétroviseur la voiture de ses parents arrivant à hauteur du mobile home (d) — il se plaque d'abord en arrière sur le dossier de son siège, puis conduit couché sur le volant — est celle d'un enfant pris en faute, qui a caché des choses à ses parents et, à ce titre, craint leurs représailles. Assez drôle en soi, son comportement, qui traduit une vraie «peur du gendarme», prend une dimension comique supplémentaire du fait qu'à trente ans, il est censé réagir en adulte, assumer ses choix et affronter les réticences de son entourage autrement que par une tentative de fuite.

Une autre réaction qui rapproche Simon du monde de l'enfance s'observe encore à la sapinière lorsque, littéralement, il «se bat» avec les arbres qu'il n'arrive pas à déraciner (f), un peu comme s'il les tenait pour responsables de la situation. Un tel comportement rappelle en effet la pensée magique par laquelle les enfants attribuent une «âme» aux objets qui les entourent en les prenant à partie (ainsi en donnant un coup de pied à une table à laquelle ils se sont cognés par exemple…). De nouveau ici, c'est l'âge de Simon qui donne un côté décalé, perçu comme étant plus ou moins comique selon les spectateurs, à ce type de situations.

Enfin, la crise de colère qu'il pique lorsqu'il se trouve contraint d'embarquer toutes ses affaires dans le mobile home (k) est encore du même ordre, montrant un adulte incapable de se contrôler face à une situation imprévue et plus contrariante que véritablement grave. L'attitude des parents, qui n'ont plus d'autre choix que de «rentrer aux abris» pour esquiver la violence de Simon occupé à détruire ses objets, ajoute encore au comique de la scène.

Mise en scène cinématographique (e, g, i)

Le comique que génèrent les trois situations suivantes est plus directement lié à la mise en scène cinématographique de François Pirot.

Au volant du mobile home en marche — le paysage défile à vive allure par la fenêtre située côté conducteur —, Simon boit une canette de bière; il se jette ensuite sur la banquette arrière, où il s'affale à côté de Julien tandis que le véhicule continue sa route sans conducteur (e). Cette situation, impossible dans la réalité, crée pendant quelques instants à la fois de la surprise et de la tension chez le spectateur, qui se demande comment tout ça va bien pouvoir se terminer. Très rapidement, le cadre s'élargit et l'on découvre alors qu'en réalité, le mobile home se trouve sur la remorque d'un camion en mouvement.

C'est un même jeu sur le cadre (restreint / élargi) qu'on retrouve dans la scène du mobile home en train de descendre lentement du ciel (g). Apparaissant dans le cadre de la porte qu'il vient d'ouvrir, Julien semble ne pas s'apercevoir de l'anormalité de la situation. Quelques instants plus tard, un élargissement du cadre permet au spectateur de se rendre compte qu'en fait, le mobile home se trouve à l'intérieur du garage, où il a été placé en hauteur afin que les mécaniciens puissent procéder aux réparations nécessaires. Le réalisateur a donc choisi de surprendre une nouvelle fois le spectateur en saisissant le moment où Julien s'étire dans l'encadrement de la porte du véhicule, à l'instant où il est lentement redescendu au niveau du sol. Cette situation incongrue produit des effets comiques, qui se trouvent encore renforcés lorsque nous découvrons le véritable environnement de la scène.

Enfin, une autre manière de produire de l'humour peut encore concerner le montage, autrement dit la manière dont les plans et les séquences du film sont agencés. Ainsi, la situation un peu absurde où Julien passe au détecteur de métaux le terrain où est garé le mobile home (i), prend des proportions d'autant plus aberrantes qu'elle apparaît à deux reprises en insert au cours de la séquence, d'une tonalité plutôt romantique, durant laquelle Simon chante et joue de la guitare pour Maya.

Prolongement

En prolongement, l'on propose ci-dessous quelques images du film qui illustrent le thème du road movie et qui devraient permettre aux spectateurs d'en saisir la portée légèrement ironique sous la caméra de François Pirot.

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