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Extrait du dossier pédagogique
réalisé par les Grignoux et consacré au film
Osama
de Siddiq Barmak
Aghanistan, 2003, 1 h 23

Le dossier pédagogique dont on trouvera un court extrait ci-dessous s'adresse aux enseignants du secondaire qui verront le film Osama avec leurs élèves (à partir de quatorze ans environ). Il contient plusieurs animations qui pourront être rapidement mises en œuvre en classe après la vision du film.

Cinq scènes à commenter

Organisons la classe en cinq groupes. Soumettons à chacun une des scènes sommairement décrites ci-dessous. Invitons les groupe à commenter la scène: il s'agit d'exprimer ce que cette scène évoque, les interprétations que l'on peut en faire. Les groupes mettent ensuite en commun leurs interprétations.

  • On coupe les cheveux de la jeune fille. Une mèche est plantée dans un pot, telle une plante. Plus tard, la mère et la fille reviennent de chez un patient décédé avec un support d'intraveineuse. L'intraveineuse goutte doucement dans le pot...
  • Sur la vitre embuée du magasin où elle travaille, Osama dessine la silhouette d'une petite fille.
  • Du sang coule sur les jambes d'Osama quand on la sort du puits où elle était pendue.
  • Chez le vieux mollah, celui-ci présente à Osama un «collier» de cadenas. Il l'invite à en choisir un.
  • Osama, tête nue, saute à la corde dans la prison.

Commentaires

Ces scènes ont chacune une portée poétique et/ou symbolique. Voici le genre de commentaire que l'on pourrait faire à propos de ces scènes... Ils pourront être soumis aux participants après que ceux-ci ont fait leurs propres commentaires, de manière à confronter les interprétations.

  • La mèche de cheveux de la jeune fille est évidemment le symbole de sa féminité. (Lui couper les cheveux est la seule opération nécessaire pour la transformer en garçon.) Planter cette mèche dans un pot de terre, c'est se donner l'illusion que sa féminité va continuer à croître, «transplantée». (Les cheveux qui poussaient sur ma tête vont continuer à pousser dans ce pot...) Mais l'on sait bien que c'est impossible: la «plante» peut dès lors être vue comme le souvenir du sacrifice consenti par la jeune fille.
    Plus tard, l'on voit l'intraveineuse goutter doucement dans le pot. Cela évoque la nourriture dont la plante a besoin pour pousser mais, en l'occurrence, il s'agit d'un médicament qui humecte la terre. C'est la féminité qui est malade: celle de la jeune fille, bien sûr, qui doit la dissimuler... mais aussi celle de toutes les femmes en Afghanistan qui vivent, sous les Talibans, complètement cloîtrées. Cette prison portable qu'est la burka n'est que le signe le plus visible de «l'empêchement» dans lequel sont maintenues les femmes. L'interdiction de la coquetterie (des doigts ont été coupés pour avoir été vernis...) se double d'autres interdictions (celle de sortir seule, de parler aux étrangers, d'étudier, de travailler, de choisir son mari, etc.)
  • Osama dessine du bout du doigt la silhouette d'une petite fille sur la vitre embuée du magasin. Ce dessin, qui passe inaperçu sauf aux yeux du spectateur, révèle la féminité de la jeune fille. C'est elle-même qu'elle dessine, avec ses cheveux longs. Son apparence est celle d'un garçon mais elle s'exprime en fille. On pourra noter que la vision de l'extérieur rendue opaque par la buée est nette là où est passé le doigt d'Osama... C'est sa vision de fille qui est juste et nette. (La vision brouillée qu'a Osama de l'extérieur par la vitre embuée fait penser à la vision très réduite que doivent avoir les femmes afghanes sous la burka... Ce vêtement ne fait pas que cacher le corps des femmes aux hommes; il limite également fortement le regard des femmes sur le monde.)
  • Le sang qui coule le long des jambes d'Osama est évidemment le signe de sa féminité: la jeune fille a ses premières règles. Là voilà donc indubitablement découverte. Le vieux mollah soulève son vêtement pour vérifier d'où vient le sang et déclare: «c'est une fille». Aussitôt, le jeune mollah lui met une burka de force. Non seulement «Osama» est une fille et les a trompés mais de plus, c'est désormais une femme qui doit être dissimulée au regard des hommes.
    Si les règles de la jeune fille font office de preuve, elles ont aussi, dans le film, une dimension symbolique: la féminité est, en quelque sorte, irréductible...
  • Le vieux mollah est réellement troublé par la jeune fille. Il lui présente un collier de cadenas et l'invite à en choisir un comme il offrirait un bijou à une femme ou une friandise à un enfant... comme si ce cadeau allait la convaincre de lui accorder ses faveurs... Le décalage est grand entre le «cadeau» offert par le mollah et la répulsion que la jeune fille éprouve à son égard. Mais elle n'est pas en mesure de le rejeter... Ce cadeau paraît d'autant plus dérisoire qu'il s'agit d'un cadenas, sans doute celui qui permettra au mollah de la tenir enfermée. Il l'invite donc à choisir elle-même le symbole de son emprisonnement.
  • On voit à plusieurs reprises la jeune fille sauter à la corde... La première fois, elle se voit sauter à la corde après s'être réfugiée pendant la manifestation. Sa «vision» traduit son désir d'une enfance «normale», d'être une petite fille qui peut jouer à l'extérieur. La seconde, elle joue dans l'arrière-boutique de l'épicier pour qui elle travaille: personne ne peut la voir, elle peut jouer un instant, un jeu de fille et un jeu d'enfant. On la verra enfin sauter à la corde dans la prison où elle est enfermée après avoir été découverte. Cette scène est onirique: elle se voit jouer, mais ne joue pas en réalité. Le symbole est très fort cette fois: il est déjà choquant de voir une enfant emprisonnée mais son rêve exprime bien comment son enfance a été confisquée. On revoit cette image une dernière fois, après la «nuit de noces», comme un souvenir, un rêve qui ne se reproduira plus jamais. Sa vie, comme celle des autres épouses du mollah, vient d'être brisée, et avec elle l'enfance, à jamais perdue.

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