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Extrait du dossier pédagogique
réalisé par les Grignoux et consacré au film
L'histoire du chameau qui pleure
de Byambasuren Davaa et Luigi Farloni
Mongolie/Allemagne, 2003, 1 h 30

Le dossier pédagogique dont on trouvera un court extrait ci-dessous s'adresse aux enseignants du primaire qui verront le film L'histoire du chameau qui pleure avec leurs élèves (entre neuf et onze ans environ). Il contient plusieurs animations qui pourront être rapidement mises en œuvre en classe après la vision du film.

Un dispositif particulier...

Dans le film, on voit le jeune Ugna faire pipi dans la steppe! On l'a dit, cette scène nous fait sourire mais elle met aussi en évidence le caractère désertique de la steppe puisqu'Ugna ne cherche pas à se mettre à l'abri des regards. Le seul regard qui l'observe est celui du spectateur et, dans ce documentaire-ci, comme dans les fictions, comme au théâtre, les acteurs feignent de l'ignorer... Cette scène permet donc de mettre en évidence une convention qui existe dans presque tous les films: les personnes qui sont filmées, les acteurs, font «comme si» la caméra et l'équipe du film n'étaient pas là. C'est aussi le cas dans L'histoire du chameau qui pleure mais cette convention est ici un peu plus remarquable que dans un film de fiction puisqu'il s'agit d'un documentaire qui cherche à préserver la plus grande authenticité possible. Cette authenticité est donc un petit peu biaisée puisque les personnes filmées font quand même semblant d'être seules, dans leur environnement habituel, alors que cet environnement est néanmoins «perturbé» par la présence d'une équipe de cinéma!

Demandons aux enfants à quoi l'on peut voir que les personnes du film font semblant que la caméra n'est pas là?

Invitons-les à regarder les photos du film reproduites dans le dossier imprimé [une seule de ces photos et disponible sur cete page web] et à les commenter dans ce sens.

Demandons aux enfants si tout le film est conçu selon ce dispositif.

Commentaire

L'élément essentiel qui permet d'affirmer que les personnes du film font «comme si» la caméra n'était pas là est qu'ils ne la regardent jamais de face. Au cinéma, regarder quelque chose rend cette chose existante. Par exemple, un personnage qui regarde hors champ (c'est-à-dire que son regard est dirigé vers quelque chose qui n'apparaît pas à l'écran) fait que la chose existe dans notre imagination (même si elle n'existe pas dans la réalité du tournage!). De la même manière, si une personne du film regarde la caméra, la caméra existe pour les spectateurs, alors qu'elle cherche précisément à se faire oublier! On pourrait même dire que si la personne du film regarde la caméra, c'est nous, spectateurs, qu'elle regarde! Mais nous ne sommes pas censés être regardés quand nous allons au cinéma [1].

Il y a deux exceptions à ce dispositif: au début du film et à la fin. Au début du film, le grand-père raconte l'histoire du chameau qui avait donné ses bois au cerf, qui ne les lui a jamais rendus... Pendant qu'il raconte, le grand-père est «face caméra», il s'adresse à la caméra et donc aux spectateurs du film. L'autre exception correspond au générique de fin où l'on voit les différents personnages du film en «portraits filmés», souriants. Ce sourire exprime beaucoup: face caméra, chacune des personnes qui apparaît dans le film déjoue la convention selon laquelle «elle nous ignore». Même si elle ne dit rien, elle parle en son propre nom... Elle nous envoie un message personnel... «Je t'adresse mon sourire, à distance...» Notons que ces deux exceptions se produisent aux extrémités du film, comme une ouverture et une fermeture.

Prolongement: commenter des photographies

L'enseignant aura assemblé des photos de différentes origines et montrant des personnes (photos de presse, portraits, photos de famille ou de vacances, photos d'art, etc.). Chaque enfant peut aussi apporter une photo de son choix. La seule consigne est que cette photo doit représenter une personne. Mais elle peut provenir des photos de famille, d'un magazine, d'un livre, etc.

Invitons les enfants à commenter ces images en répondant aux questions suivantes: La personne sur la photo sait-elle qu'on la prend en photo? Fait-elle semblant que le photographe n'est pas là? Se comporte-t-elle en fonction du photographe?

Demandons aux enfants de justifier leurs réponses.

Citons trois exemples très différents de photos pouvant illustrer cette animation:

William Klein prend volontiers des photos rendues floues par le mouvement, par exemple Minigang (1954) où un gosse grimaçant pointe son revolver (un jouet sans doute mais l'objet est flou) en plein dans l'objectif du photographe.

Henri Cartier-Bresson avec une photo aussi célèbre qu'énigmatique, prise à Bruxelles (1932), saisit deux hommes face à un mur de toile: ce sont des fraudeurs qui regardent par des trous un spectacle dissimulé par cette toile, mais l'un des deux hommes, moustachu, a senti la présence du photographe et tourne son regard vers lui.

Philippe Halsman, photographe de personnalités célèbres comme Marilyn Monroe, leur demandait de sauter en l'air (ou sur un trampoline) pour retrouver une spontanéité que la pose photographique risquait de faire disparaître (ces photos «en l'air» ont fait l'objet d'un recueil intitulé Jump Book publié en 1959).


[1] Quand, exceptionnellement, un personnage d'un film s'adresse à la caméra, cela est vécu comme une sorte de transgression, qui peut avoir un effet comique. Cela induit une complicité un peu artificielle entre le personnage du film et le spectateur, comme si le personnage était autonome par rapport à l'auteur du film, alors que c'est bien sûr l'auteur du film qui a décidé que le personnage devait s'adresser à la caméra.


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